Rediffusion

Inéluctable submersion en Polynésie

Urbaniste

Face à la hausse plus rapide que prévue du niveau des mers, la nécessité de réorganiser l’archipel des Tuamotu en Polynésie s’imposera à moyen et long termes en raison de sa grande vulnérabilité aux submersions marines. Pour préparer cela, un schéma d’habitabilité et de résilience de l’ensemble de la Polynésie, intégrant des scénarios contrastés et hybrides de relogement des futurs réfugiés climatiques devrait être élaboré démocratiquement. Rediffusion d’un article du 8 mars 2024.

« Avec le changement climatique, les petites îles du Pacifique sont en grand danger et certaines vont devenir inhabitables, voire disparaître. Réunis, les États insulaires du Pacifique représentent moins de 1% des émissions de gaz à effet de serre […]
Pourtant, ils sont en première ligne et leur futur n’est pas entre leurs mains. »
Hélène Jacot Descombes, « Des atolls en péril », tribune de la revue Reliefs n°16

Au moment où les délégations présentes à la COP27 de Charm el-Cheikh s’écharpaient sur une déclaration finale concernant la mise en place d’un fonds mondial destiné à indemniser les pays les plus pauvres et les plus impactés par le réchauffement climatique, le ministre des Affaires étrangères des Tuvalu − petit état insulaire de 11 000 habitants répartis sur neuf atolls du Pacifique Sud-Ouest − essaya une fois encore de frapper les consciences pour accentuer la pression sur les bailleurs de fonds.

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Dans une vidéo qui fit aussitôt le buzz à travers le monde, il se mit en scène devant un atoll en image de synthèse pour rappeler au monde que son pays était en train d’être englouti et qu’il devrait ressusciter dans le métavers pour conserver un semblant d’existence virtuelle.

Avons-nous entendu la voix des polynésiens du Fenua[1] à cette même COP, alors qu’ils sont eux aussi très directement concernés par les conséquences de l’élévation du niveau de la mer ? Très peu finalement. Dans une interview donnée au quotidien Tahiti Infos, le ministre de l’Environnement et des Ressources marines du Fenua, Heremoana Maamaatuaiahutapu, s’est quand même réjoui de la création d’un fonds spécial d’aide aux pays victimes des effets du réchauffement climatique. Il s’agit d’une « compensation des dégâts réclamée aux pays riches, principaux responsables du réchauffement climatique », a-t-il déclaré. Mais cette déclaration cache un certain embarras de la part du gouvernement de ce « pays et territoire d’outre-mer » (PTOM) largement autonome, mais toujours très dépendant d


[1] Mot tahitien désignant le « pays » qu’est la Polynésie française.

[2] Aux Tuamotu, les côtes extérieures des atolls sont protégées par des « levées détritiques », sortes de digues naturelles formées par les débris de coraux et coquillages accumulés par la houle. Faute d’alternative, il n’est pas rare que les habitants prélèvent ces matériaux détritiques pour réaliser des remblais sur les lagons ou couler du béton.

[3] Dont l’auteur faisait partie comme chef de projet.

[4] Il s’agit des « farés MTR » conçus pour résister aux cyclones. Fare est le terme tahitien traditionnel désignant une habitation généralement réalisée en bois et pandanus. Aujourd’hui ces logements sont préfabriqués en matériaux industriels et livrés en kit.

[5] Voir à ce sujet l’excellent documentaire de l’université de la Nouvelle-Calédonie Nations of Water disponible sur Youtube.

[6] Cf. définition dans la note de bas de page 2.

[7] Par exemple à la manière dont se tiennent les débats organisés par la Commission nationale du débat public (CNDP).

[8] Cf. tribune co-rédigée avec Jean-François Henric (EGIS Conseil), publiée dans la rubrique « Débat-Environnement » du Monde le 12/12/2022.

[9] Les données précises concernant ces migrations climatiques n’existent pas puisque les demandes de visas vers les grands pays d’accueil n’incluent pas le motif de leur demande. Elles sont sans doute encore faibles relativement aux migrations purement économiques. Selon un rapport de l’Office International des Migrations (OIM), entre 2000 et 2016, le nombre de migrants permanents pour des raisons humanitaires en Australie, venant de la république des Fidji, a été de 359 (soit 2 % du total, loin derrière les migrants pour raison de travail à 51 %). La Nouvelle-Zélande offre 1 750 visas d’immigration permanente par an à des citoyens originaires des pays insulaires du pacifique (PICs en anglais) en plus de visas de travail temporaires dont les Fidjiens sont les principaux bénéficiaires avec 6 000 visas accordés e

Laurent Perrin

Urbaniste

Notes

[1] Mot tahitien désignant le « pays » qu’est la Polynésie française.

[2] Aux Tuamotu, les côtes extérieures des atolls sont protégées par des « levées détritiques », sortes de digues naturelles formées par les débris de coraux et coquillages accumulés par la houle. Faute d’alternative, il n’est pas rare que les habitants prélèvent ces matériaux détritiques pour réaliser des remblais sur les lagons ou couler du béton.

[3] Dont l’auteur faisait partie comme chef de projet.

[4] Il s’agit des « farés MTR » conçus pour résister aux cyclones. Fare est le terme tahitien traditionnel désignant une habitation généralement réalisée en bois et pandanus. Aujourd’hui ces logements sont préfabriqués en matériaux industriels et livrés en kit.

[5] Voir à ce sujet l’excellent documentaire de l’université de la Nouvelle-Calédonie Nations of Water disponible sur Youtube.

[6] Cf. définition dans la note de bas de page 2.

[7] Par exemple à la manière dont se tiennent les débats organisés par la Commission nationale du débat public (CNDP).

[8] Cf. tribune co-rédigée avec Jean-François Henric (EGIS Conseil), publiée dans la rubrique « Débat-Environnement » du Monde le 12/12/2022.

[9] Les données précises concernant ces migrations climatiques n’existent pas puisque les demandes de visas vers les grands pays d’accueil n’incluent pas le motif de leur demande. Elles sont sans doute encore faibles relativement aux migrations purement économiques. Selon un rapport de l’Office International des Migrations (OIM), entre 2000 et 2016, le nombre de migrants permanents pour des raisons humanitaires en Australie, venant de la république des Fidji, a été de 359 (soit 2 % du total, loin derrière les migrants pour raison de travail à 51 %). La Nouvelle-Zélande offre 1 750 visas d’immigration permanente par an à des citoyens originaires des pays insulaires du pacifique (PICs en anglais) en plus de visas de travail temporaires dont les Fidjiens sont les principaux bénéficiaires avec 6 000 visas accordés e