écologie

Des territoires aux avant-postes du changement climatique

Architecte, urbaniste

Les inondations inédites, l’an passé, en Émilie-Romagne ou encore les feux de forêts, cet été, aux portes d’Athènes ont une nouvelle fois prouvé que les situations climatiques extrêmes ne sont pas seulement l’affaire de quelques territoires qu’un océan maintient à bonne distance de l’hexagone. Dans ce contexte, les projets précurseurs de refondation territoriale à Miquelon-Langlade (Saint-Pierre-et-Miquelon) et au Prêcheur (Martinique) offrent l’opportunité d’une réinvention des outils d’aménagement et deviennent des terrains d’expérimentation et d’apprentissage pour tous.

Malgré ses manifestations de plus en plus fréquentes, le changement climatique comme l’érosion de la biodiversité restent, pour nombre de territoires et leurs gouvernances, un horizon flou voire une abstraction. Une menace diffuse qu’il est finalement aisé de passer au second plan des problématiques d’aménagement.

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Tel n’est pas le cas du village de Miquelon-Langlade (sur l’île subarctique de Saint-Pierre-et-Miquelon) ni du bourg du Prêcheur, posé sur le flanc Nord-Ouest de la montagne Pelée, en Martinique[1]. Aux « antipodes » climatiques, sociaux et culturels, ces deux communes ultramarines aux histoires contrastées partagent un destin commun : la reconfiguration de leurs territoires « historiques » au gré d’une transformation drastique de leur littoral[2]. Un « effacement » total et de court terme dans le cas de Miquelon, partiel et plus progressif au Prêcheur, par ailleurs confronté à une multitude de risques amplifiés par les conséquences du changement climatique. Et pourtant, les habitants désirent perdurer sur leurs terres, aspirant à un futur tout à la fois sécure et heureux, compatible avec les limites écologiques de leur milieu d’accueil.

La situation a conduit l’État, à l’instigation des collectivités locales, à y soutenir des études à la fois prospectives et opérationnelles, portant toutes deux une dimension expérimentale en quête de réplicabilité. Au Prêcheur par le biais de la démarche « Imaginer le littoral de demain »[3], initiée en 2016 et relayée en 2018 par le Plan urbanisme, construction et architecture (PUCA)[4] ; à Miquelon-Langlade dans le cadre d’un « Atelier des Territoires », plateforme de projets pilotée en 2022 par le ministère en charge de l’aménagement[5].

Misant sur la co-construction avec les habitants, ces deux processus d’accompagnement défrichent « depuis le terrain » des sujets complexes et entremêlés, à la fois techniques, politiques, économiques, humains et symboliques. Pas à pas, ils esquissent des méthodes en quête d’


[1] Respectivement 585 habitants (pour près de 6 000 habitants sur l’archipel) et 1 377 habitants (pour 376 480 habitants à l’échelle de l’île). L’ouvrage collectif Territoires submergés (Terre Urbaine, 2023) a comparé ces deux territoires confrontés au défi de leur recomposition spatiale.

[2] Formé au XVIIIe siècle, l’isthme sur lequel est bâti le village de Miquelon-Langlade est voué à disparition. Au Prêcheur, entre 1947 et 2010, le linéaire côtier de la commune a connu un recul d’environ 2 km2, avec une perte moyenne de 2 m/an selon des dynamiques complexes résultant d’un réajustement sédimentaire consécutif aux éruptions du XXe siècle.

[3] Appel à idées citoyen lancé par le ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer et donnant suite aux travaux du Comité national de gestion intégrée du trait de côte.

[4] Service interministériel ayant pour objet de faire progresser la connaissance sur les villes et les territoires. En 2018, il lance une étude de maîtrise d’œuvre urbaine, paysagère et sociologique, confiée à une équipe pluridisciplinaire pilotée par l’atelier d’urbanisme et d’architecture (APM)&associés.

[5] La démarche « Ateliers des Territoires » promeut la définition de stratégies ou de projets d’aménagement engagés dans la transition écologique. Piloté par la Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN), cet atelier se poursuit depuis 2023 par un accord-cadre de maîtrise d’œuvre urbaine, piloté par les urbanistes-programmistes de Métamorphoses Urbaines.

[6] En juillet 2023, un Comité interministériel des Outre-mer a annoncé 1,5 millions d’euros dédiés au déplacement du village de Miquelon, projet qualifié de « sans précédent sur le territoire national », faisant de l’archipel un « moteur dans l’anticipation des conséquences du changement climatique ».

[7] Longtemps liée à la pêche, l’économie de l’archipel est aujourd’hui structurée par les services administratifs. Le vieillissement et la décroissance démographique re

Antoine Petitjean

Architecte, urbaniste

Notes

[1] Respectivement 585 habitants (pour près de 6 000 habitants sur l’archipel) et 1 377 habitants (pour 376 480 habitants à l’échelle de l’île). L’ouvrage collectif Territoires submergés (Terre Urbaine, 2023) a comparé ces deux territoires confrontés au défi de leur recomposition spatiale.

[2] Formé au XVIIIe siècle, l’isthme sur lequel est bâti le village de Miquelon-Langlade est voué à disparition. Au Prêcheur, entre 1947 et 2010, le linéaire côtier de la commune a connu un recul d’environ 2 km2, avec une perte moyenne de 2 m/an selon des dynamiques complexes résultant d’un réajustement sédimentaire consécutif aux éruptions du XXe siècle.

[3] Appel à idées citoyen lancé par le ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer et donnant suite aux travaux du Comité national de gestion intégrée du trait de côte.

[4] Service interministériel ayant pour objet de faire progresser la connaissance sur les villes et les territoires. En 2018, il lance une étude de maîtrise d’œuvre urbaine, paysagère et sociologique, confiée à une équipe pluridisciplinaire pilotée par l’atelier d’urbanisme et d’architecture (APM)&associés.

[5] La démarche « Ateliers des Territoires » promeut la définition de stratégies ou de projets d’aménagement engagés dans la transition écologique. Piloté par la Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN), cet atelier se poursuit depuis 2023 par un accord-cadre de maîtrise d’œuvre urbaine, piloté par les urbanistes-programmistes de Métamorphoses Urbaines.

[6] En juillet 2023, un Comité interministériel des Outre-mer a annoncé 1,5 millions d’euros dédiés au déplacement du village de Miquelon, projet qualifié de « sans précédent sur le territoire national », faisant de l’archipel un « moteur dans l’anticipation des conséquences du changement climatique ».

[7] Longtemps liée à la pêche, l’économie de l’archipel est aujourd’hui structurée par les services administratifs. Le vieillissement et la décroissance démographique re