Le street art, un avant-goût de l’art en régime néolibéral
L’actualité du secteur de la culture a été fortement marquée par les annonces de réduction budgétaire formulées à l’autonome par les différentes administrations centrales et locales. On a, par exemple, largement discuté les coupes drastiques annoncées par la présidence de la Région des Pays de la Loire, témoignant d’une escalade rarement atteinte dans le fanatisme de l’austérité. Les différent·es commentateur·rices ont souligné, à juste titre, les conséquences dramatiques de cette décision sur l’ensemble du secteur culturel dans la région : disparition de structures, perte d’emplois, assèchement drastique de l’offre dans de nombreux espaces, etc.

Si elles se confirment, ces coupes menacent par ailleurs d’accélérer drastiquement un processus déjà identifié depuis une vingtaine d’années : celui de l’hétéronomisation des conditions de la production artistique. En effet, si la conquête de liberté qui accompagne la construction moderne des professions d’artistes s’est réalisée au XIXe siècle par la mise à distance de l’emprise du pouvoir politique sur la création artistique, la sociologie de la culture a amplement souligné comment l’État s’était imposé, dans la deuxième partie du XXe siècle, comme une institution garantissant, au moins partiellement, l’autonomie de la production culturelle. Ainsi, dans le cinéma, le théâtre, la danse, le spectacle vivant ou l’art contemporain, les institutions publiques ont joué, en France, un rôle protecteur pendant plusieurs décennies, en assurant un financement large, en partie détaché des impératifs de rentabilité, permettant l’expression d’une liberté de fond et de forme pour les créateur·rices.
Or, depuis au moins la fin des années 1990, l’importation de logiques gestionnaires à l’intérieur des institutions publiques, l’instrumentalisation de la culture comme vecteur de croissance ou le recours de plus en plus fréquent à des partenariats public-privé contribuent à menacer ce lien entre financement public et protection de