Chrétiens d’Orient : quand une tradition catholique guide la politique étrangère de la France au Moyen-Orient
Le 3 janvier 2025, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a effectué une visite en Syrie, à la suite de la chute du régime de Bachar al-Assad. Il aura donc fallu attendre quinze années pour qu’une autorité française refoule le sol syrien[1], treize pour entamer la réouverture de l’ambassade française à Damas fermée depuis 2012. Sur les plans politique et diplomatique, tout semble à reconstruire.

Le nouveau pouvoir syrien issu du groupe Hayat Tahrir al-Cham (HTC) offre peu de certitudes et il faut mesurer la rupture que constitue la fin d’un régime, qui a monopolisé la représentation syrienne sur la scène internationale, et cela depuis les années 1970. Or, c’est précisément dans ces moments de flottement que le monde de la diplomatie en appelle à des protocoles qui semblent résister à l’épreuve du temps et aux changements de régimes comme de gouvernements. La visite du ministre français en Syrie nous en a offert une éclatante illustration. Dès sa descente de l’avion, Jean-Noël Barrot s’est ainsi rendu auprès des chefs religieux chrétiens de Syrie, dont il a rappelé le statut de « partenaires historiques de la France »[2]. Comme si la visite du ministre avait eu besoin, pour appréhender les bouleversements en cours en Syrie, de se rassurer par l’accomplissement d’un rite diplomatique. Cet empressement de la diplomatie française à renouer avec les communautés chrétiennes de Syrie porte un nom, celui de la tradition française de protection des chrétiens d’Orient.
Dans une lettre du 29 juillet 1860 à son ambassadeur à Londres, Napoléon III écrivait déjà au sujet d’une intervention française en Syrie: « Je souhaiterais beaucoup ne pas être obligé de faire l’expédition en Syrie (…). Mais, d’un autre côté, je ne vois pas comment résister à l’opinion publique de mon pays, qui ne comprendra jamais qu’on laisse impunis, non-seulement le meurtre des chrétiens, mais l’incendie de nos consulats, le déchirement de notre drapeau, le pillage des mo