Société

Le genre au cœur d’un nouvel ordre global

Socio-économiste, Sociologue

À coups de déclarations brutales et de décrets chocs, Donald Trump a lancé une violente offensive contre les droits, notamment ceux des femmes et des minorités sexuelles. Initiée lors de son premier mandat, cette campagne prolonge et renforce une lame de fond de mesures conservatrices – voire réactionnaires – qui traverse l’ensemble de la planète : les normes de genre sont au cœur de l’émergence d’un nouvel ordre global.

Les avancées durement acquises en matière de droits des femmes connaissent de sérieuses régressions. Mouvements religieux fondamentalistes d’obédience diverses (catholique, évangéliste, islamique, hindouiste) et groupes politiques d’extrême droite, avec l’appui de grandes fortunes, mènent un combat massif et très structuré contre l’égalité de genre.

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Donnons en quelques exemples, non exhaustifs[1]. Le cas afghan, où les femmes et les filles sont désormais interdites de toute activité en dehors de leur domicile, est le cas le plus emblématique. Dans certains pays, le droit à l’avortement, acquis de haute lutte, régresse, que ce soit par sa re-pénalisation (États-Unis, Nicaragua), le renforcement de ses restrictions (Brésil, Hongrie, Mexique), l’introduction délibérée d’obstacles bureaucratiques ou la suppression de services de santé reproductive (les cas sont multiples). L’impunité sur les violences domestiques s’aggrave (décriminalisation des violences n’entraînant pas de blessures graves [Russie]), remise en question de la catégorie juridique de féminicide (Argentine), assouplissement des législations sur le port d’armes (États-Unis), retrait ou menace de retrait de conventions internationales (Turquie, Pologne). Les institutions de protection et de défense des droits des femmes sont affaiblies ou disparaissent, comme les secrétariats d’État dédiés aux femmes (Turquie, Argentine, Brésil lors de la présidence Bolsonaro), les mesures législatives favorisant la diversité, l’équité et l’inclusion des minorités, dont les femmes (États-Unis), les programmes et politiques d’égalité et les ONG féministes (les cas sont multiples).

Ces régressions s’accompagnement d’un renforcement de la criminalisation de l’homosexualité (Ouganda, Kenya, Congo, Ghana, Irak, Indonésie), d’un retour en arrière sur la reconnaissance des droits des personnes transgenres (États-Unis, Russie) ou encore du durcissement des interdictions de mariage interreligieux (Inde). On observe aussi u


[1] Voir le bilan élaboré en 2023 par un rapport Equipop/Fondation Jean Jaurès, qu’il faudrait actualiser.

[2] Voir l’analyse de Verónica Gago pour le cas Argentin.

[3] María Lugones, “La colonialité du genre,” trans. Javiera Coussieu-Reyes and Jules Falquet, Les cahiers du CEDREF. Centre d’enseignement, d’études et de recherches pour les études féministes, no. 23 (September 1, 2019): 46–89.

[4] Mara Viveros Vigoya, Les couleurs de la masculinité. Expériences intersectionnelles et pratiques de pouvoir en Amérique latine (Paris: La Découverte, 2018); Elsa Dorlin, Matrice de la race: généalogie sexuelle et coloniale de la nation française (Paris: La Découverte, 2006).

[5] Rosalind O. Hanlon, A Comparison Between Women and Men: Tarabai Shinde and the Critique of Gender Relations in Colonial India (Oxford: Oxford University Press, 2000).

[6] Lila Abu‐Lughod, “Do Muslim Women Really Need Saving? Anthropological Reflections on Cultural Relativism and Its Others,” American Anthropologist 104, no. 3 (September 2002): 783–90,.

[7] Gayatri Chakravorty Spivak, “Can the Subaltern Speak?,” Die Philosophin 14, no. 27 (2003): 42–58.

[8] Ioana Cîrstocea et Françoise Thébaud, “Le genre, un enjeu central de la guerre froide,” Clio. Femmes, Genre, Histoire 57, no. 1 (June 13, 2023) : 7–22.

[9] Kalpana Wilson, “For Reproductive Justice in an Era of Gates and Modi: The Violence of India’s Population Policies,” Feminist Review 119, no. 1 (July 1, 2018) : 89–105.

[10] Bénédicte Gastineau et Agnès Adjamagbo, “Les droits individuels face aux politiques de population. Regard sur trois pays africains : Bénin, Madagascar, Maroc,” Autrepart 70, no. 2 (2014): 125–42.

[11] Françoise Vergès, Le Ventre Des Femmes (Paris : Albin Michel, 2017).

[12] Dorlin, Matrice de la race.

[13] Aurore Koechlin, “Face à l’internationale d’extrême droite : que reste-t-il de la quatrième vague féministe ?”, CONTRETEMPS (blog), 7 mars 2025.

[14] Isabelle Hillenkamp et Héloïse Prévost, “Extractivisme et Résistances Pa

Isabelle Guérin

Socio-économiste, Directrice de recherche à l'Institut de recherche pour le développement (IRD) – Cessma

Kalpana Karunakaran

Sociologue, Professeure associée au département des sciences humaines et sociales de IIT-Madras (Indian Institute of Technology, Chennai, Inde)

Rayonnages

SociétéGenre

Notes

[1] Voir le bilan élaboré en 2023 par un rapport Equipop/Fondation Jean Jaurès, qu’il faudrait actualiser.

[2] Voir l’analyse de Verónica Gago pour le cas Argentin.

[3] María Lugones, “La colonialité du genre,” trans. Javiera Coussieu-Reyes and Jules Falquet, Les cahiers du CEDREF. Centre d’enseignement, d’études et de recherches pour les études féministes, no. 23 (September 1, 2019): 46–89.

[4] Mara Viveros Vigoya, Les couleurs de la masculinité. Expériences intersectionnelles et pratiques de pouvoir en Amérique latine (Paris: La Découverte, 2018); Elsa Dorlin, Matrice de la race: généalogie sexuelle et coloniale de la nation française (Paris: La Découverte, 2006).

[5] Rosalind O. Hanlon, A Comparison Between Women and Men: Tarabai Shinde and the Critique of Gender Relations in Colonial India (Oxford: Oxford University Press, 2000).

[6] Lila Abu‐Lughod, “Do Muslim Women Really Need Saving? Anthropological Reflections on Cultural Relativism and Its Others,” American Anthropologist 104, no. 3 (September 2002): 783–90,.

[7] Gayatri Chakravorty Spivak, “Can the Subaltern Speak?,” Die Philosophin 14, no. 27 (2003): 42–58.

[8] Ioana Cîrstocea et Françoise Thébaud, “Le genre, un enjeu central de la guerre froide,” Clio. Femmes, Genre, Histoire 57, no. 1 (June 13, 2023) : 7–22.

[9] Kalpana Wilson, “For Reproductive Justice in an Era of Gates and Modi: The Violence of India’s Population Policies,” Feminist Review 119, no. 1 (July 1, 2018) : 89–105.

[10] Bénédicte Gastineau et Agnès Adjamagbo, “Les droits individuels face aux politiques de population. Regard sur trois pays africains : Bénin, Madagascar, Maroc,” Autrepart 70, no. 2 (2014): 125–42.

[11] Françoise Vergès, Le Ventre Des Femmes (Paris : Albin Michel, 2017).

[12] Dorlin, Matrice de la race.

[13] Aurore Koechlin, “Face à l’internationale d’extrême droite : que reste-t-il de la quatrième vague féministe ?”, CONTRETEMPS (blog), 7 mars 2025.

[14] Isabelle Hillenkamp et Héloïse Prévost, “Extractivisme et Résistances Pa