L’Égalité selon la droite contemporaine
Lorsque le Premier ministre indien Narendra Modi s’est rendu dans la banlieue d’Hyderabad en 2022 pour accomplir un puja (rituel de dévotion) et inaugurer un complexe religieux en l’honneur du gourou Ramanuja, qui vécut au XIe siècle, il rendait hommage à bien plus qu’un saint hindou vénéré. Il rendait également hommage à l’égalité. Les deux se rejoignent dans l’effigie de Ramanuja, une statue géante du philosophe assis, appelée la « Statue de l’égalité ».
Culminant à 66 mètres dans le ciel, elle est destinée à honorer l’égalitarisme vanté du brahmane Ramanuja. Comme l’indique le communiqué de presse du gouvernement annonçant la visite de Modi, le saint « a promu l’idée d’égalité dans tous les aspects de la vie, y compris la foi, la caste et la croyance ».
On peut se demander si un saint du XIe siècle était réellement un défenseur de l’égalité. Mais plus précisément, pourquoi Modi, un populiste de droite, chercherait-il à s’associer à l’égalitarisme ? Après tout, on nous dit que « la seule chose qui unit toutes les variantes de l’idéologie de droite » dans le monde aujourd’hui est la résistance collective à l’égalité. S’il est vrai que la Constitution indienne consacre les droits à l’égalité des chances et à l’égalité de protection devant la loi, le pèlerinage de Modi n’avait pas pour but d’honorer les principes constitutionnels. Il signalait plutôt un flirt plus large de la droite avec l’égalité, très actuel, même s’il évoque un passé négligé. Dans l’ensemble, cet engagement nous rappelle que l’égalité n’est pas toujours la valeur bienveillante et progressiste que ses défenseurs prétendent souvent qu’elle est.
Modi est loin d’être le seul parmi les populistes nationaux du monde entier à professer son attachement à l’égalité. Ce mot, et la critique de l’inégalité qui l’accompagne, sont aujourd’hui en vogue parmi les secteurs influents de la droite. Patrick Deneen, théoricien politique de l’Université de Notre-Dame et chouchou actuel de la nouvelle droite a