Vers la fiction – à propos notamment de Nana Kwame Adjei-Brenyah et Brit Bennett
Le degré de Noirceur : c’est tout l’enjeu de la première nouvelle de Black Friday, Les 5 de Finkelstein. Selon sa voix, sa tenue vestimentaire, sa gestuelle, le protagoniste devient plus ou moins Noir, c’est-à-dire plus ou moins acceptable par la société blanche dominante. Et risque cher s’il augmente au-delà du raisonnable. Tant soit peu que la société dans laquelle il évolue soit capable de l’être… Ouvrant le recueil de Nana Kwame Adjei-Brenyah, Les 5 de Finkelstein s’inscrit dans la lignée dystopique des nouvelles qui lui succèdent, nourries de l’imaginaire des jeux vidéo comme du science-fictionnel, mais qui pourraient se dérouler demain.
Cette manipulation du réel sonne juste, et percutante – notamment dans un récit mettant en scène une journée de soldes sans foi ni loi, un Black Friday violemment satirisé (une nouvelle publiée en avant première dans les colonnes d’AOC). Cependant, Ces choses que disaient ma mère, court texte de trois pages, le plus bouleversant de l’ouvrage, relève sans aucun doute de l’autobiographique, d’autant que Adjei-Brenyah conclut ses remerciements en s’adressant à sa propre mère : « pour tout ce que tu m’as dit. »
Par la souplesse de son énergie stylistique, Adjei-Brenyah a de quoi soulever l’admiration du nouveau quasi-patriarche de la littérature africaine-américaine, Colson Whitehead. Il parle du jeune auteur comme d’une « formidable nouvelle voix », se réjouissant sans doute que des écrivain.e.s noires s’engouffrent, à sa suite, dans le vaste territoire du roman. « J’ai grandi en rêvant de devenir le Stephen King noir », m’a dit Whitehead, qui a grandi en lisant comics, séries B et autres thrillers. Depuis ses débuts en tant qu’écrivain, il y a une vingtaine d’années, il a toujours travaillé la fiction, quitte à utiliser des faits historiques réels comme terreau structurel.
Ce qui est le cas de ses deux derniers livres, qui lui ont valu chacun d’être récompensé d’un prix Pulitzer. Or, si Nickel Boys (2020) brille par so