Chant de patience – sur En route pour le milliard de Dieudo Hamadi
Après une solide reconnaissance obtenue en festivals (notamment au Cinéma du réel), le travail de Dieudo Hamadi bénéficie pour la première fois d’une sortie dans les salles françaises avec En route pour le milliard. On y retrouve ce qui fait la force du documentariste congolais : non pas la volonté d’imposer un dispositif quelconque, mais une qualité d’accompagnement et d’attention aux situations.
Il y a chez Dieudo Hamadi une tendance à faire corps avec ceux qu’il filme et il n’est pas impossible que les instants les plus emblématiques de sa pratique soient ceux où le souci de la forme s’efface devant l’événement : c’était le cas lorsque, dans Kinshasa Makambo (2018), le réalisateur-filmeur se mettait à courir aux côtés des manifestants pour échapper à la police, ça l’est encore ici dans une scène où, au milieu d’un bateau pris dans la tempête, l’objectif de la caméra est voilé par la pluie. Mais, tout en donnant l’impression d’un cinéaste parfaitement intégré aux groupes qu’il filme, jusqu’à en partager les luttes et les difficultés, le style direct d’Hamadi sait aussi faire place au travail du regard, à la recherche du bon point de vue, à la saillie du détail. Sa force tient à cette capacité à être présent au cœur de l’action tout en la découpant soigneusement avec sa caméra.

En route pour le milliard s’ouvre par ailleurs à un type de plan inédit, le montage étant entrecoupé de moments où les personnages n’apparaissent plus dans leur espace quotidien, mais sur une scène. Le film suit en effet les membres d’une association de victimes de la Guerre des Six Jours qui, en juin 2000, avait vu s’affronter les forces rwandaises et ougandaises en territoire congolais, dans la ville de Kisangani, se disputant le contrôle de richesses minières et laissant derrière eux des milliers de morts et de mutilés.
Marqués à vie dans leurs chairs par cet événement, portant béquilles et prothèses, les personnages revendiquent leur droit à une indemnisation, droit reconnu par