Série TV

Le monde d’hier – sur la série Le monde de demain

Enseignant, Journaliste

L’engouement des plateformes et chaînes de télévision pour l’histoire du rap, contre-culture qui fête ses quarante ans, trouve dans Le Monde de demain une déclinaison nostalgique, retraçant les débuts du groupe NTM et rendant compte avec brio des espaces ou objets devenus des « lieux de mémoire » de la culture hip-hop française. Non sans céder, passés les deux premiers épisodes, à un ton feel good qui minore certaines des questions pourtant structurantes du milieu rap de l’époque : toxicomanie, misogynie ou rapport aux maisons de disques.

La série produite par Arte (en collaboration avec Les films du Bélier et Netflix) sur les origines du hip-hop en France constitue un petit événement qui vient nourrir la réflexion – déjà riche – sur l’institutionnalisation du mouvement dans notre paysage culturel. Le retour sur cette production de qualité, très soignée et renseignée, permet d’interroger les différents récits qui se confrontent aujourd’hui pour évoquer la culture hip-hop, et singulièrement le rap, ultra-dominant dans l’industrie musicale contemporaine.

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Le dialogue entre le cinéma et la culture hip-hop ne date pas d’hier : dans les années 80, des films comme Wild Style (Charlie Ahearn, 1982), Beat Street (Stan Lathan, 1984) opéraient déjà la rencontre entre ce mouvement culturel et le public, contribuant à sa diffusion. En 1989, Do The Right Thing (Spike Lee) ancrait définitivement l’esthétique hip-hop sur les écrans, avec notamment un générique devenu mythique au rythme du Fight the Power de Public Enemy. Puis vint 8 Mile, où le plus gros vendeur de l’histoire du rap, Eminem, prenait ses responsabilités en dévoilant à l’écran les Battles.

En France, le rap s’est beaucoup nourri de ces images et plus largement d’une certaine culture cinématographique américaine, historiquement très présente dans les textes. Des films comme La Haine (Kassovitz, 1995), Ma 6-T va craquer (Richet, 1996) ou La squale (Genestal, 2000) mettaient à l’honneur le rap dans leur bande-son, contribuant à le diffuser hors de son auditoire traditionnel. Par ailleurs, certains collectifs avaient choisi la forme documentaire, souvent amateur et parfois de manière très réussie, pour tenter de rendre compte des « histoires derrière la musique ». L’ère des séries et ses différents « âges », en bouleversant les modes d’expression et d’appropriation de la culture populaire[1], redéfinit forcément le Hip-hop comme objet filmique.

Le monde de demain arrive sur nos écrans un an après un film, Suprêmes, qui revenait lui aussi sur le


[1] Laugier, Sandra, Nos vies en série, Flammarion, 2019.

[2] Hammou, Karim, Une histoire du rap en France, La découverte, 2012.

[3] Voir les ouvrages de Vincent Piolet aux éditions Le mot et le reste : Regarde ta jeunesse dans les yeux (2015) et NTM : Dans la fièvre du Suprême (2020).

[4] Voir Sami Zegnani, Dans le monde des cités. De la galère à la mosquée, PUR, 2013.

[5] On pense ici aux boxeurs remis à l’honneur par Loïc Wacquant dans un ouvrage récent, 30 ans après sa fameuse enquête dans un Gym à Chicago : Voyage aux pays des boxeurs, La découverte, 2022.

Ulysse Rabaté

Enseignant, Président de l'association Quidam pour l'enseignement populaire, Ex-Conseiller municipal de Corbeil-Essonnes

Ramses Kefi

Journaliste, Spécialiste des problématiques de société

Notes

[1] Laugier, Sandra, Nos vies en série, Flammarion, 2019.

[2] Hammou, Karim, Une histoire du rap en France, La découverte, 2012.

[3] Voir les ouvrages de Vincent Piolet aux éditions Le mot et le reste : Regarde ta jeunesse dans les yeux (2015) et NTM : Dans la fièvre du Suprême (2020).

[4] Voir Sami Zegnani, Dans le monde des cités. De la galère à la mosquée, PUR, 2013.

[5] On pense ici aux boxeurs remis à l’honneur par Loïc Wacquant dans un ouvrage récent, 30 ans après sa fameuse enquête dans un Gym à Chicago : Voyage aux pays des boxeurs, La découverte, 2022.