Acclimater la mort – sur Familie et Grief and Beauty de Milo Rau
Deux intérieurs. Pour Familie, une maison en brique entourée de baies vitrées occupe l’essentiel du plateau. Devant, une table et deux chaises de jardin figurent l’espace ouvert d’une terrasse. Pour Grief and Beauty, l’écorché d’un appartement de trois pièces : salle de bain, chambre, cuisine-salle à manger s’égrènent de jardin à cour.

Au-dessus de ces deux intérieurs, un écran sur lequel sont projetées les images filmées par une caméra mobile. La famille qui habite cette maison et l’homme qui vit dans cet appartement mourront au cours du spectacle ; volontairement. Les premiers, un couple et ses deux filles, se suicideront en se pendant devant la baie vitrée de leur salle à manger. Le second, âgé et malade, aura recours à l’assistance d’une infirmière et mourra dans son lit, entouré de ses proches. Les deux pièces mettent en scène les moments qui précèdent ces morts volontaires.
On assiste dans Familie à l’ordinaire de la vie d’une famille aisée mais relativement moyenne de la Belgique flamande ; dont les filles apprennent l’anglais et dont la mère est capable de citer Gustave Flaubert au milieu d’une conversation anodine. Le père cuisine en écoutant un disque de Leonard Cohen, la mère colle des photos de famille sur la porte de la salle de bain, les filles font leurs devoirs et jouent avec leurs deux petits chiens, etc. À ce que l’on voit et devine à travers les baies vitrées s‘ajoutent les images que la caméra filme. Elle passe de l’une à l’autre, s’approche des corps, détaille les gestes, révèle des espaces invisibles depuis la salle, comme si elle cherchait dans la banalité des scènes quelque signe avant-coureur du drame à venir. Mais il n’y aura pas de drame. Les filles pleureront et se débattront un peu quand le temps sera venu de mourir, les chiens grogneront. Puis elles sècheront leurs larmes et aideront leurs parents à passer les cordes et à serrer les nœuds.
À deux reprises, au début du spectacle et quelques minutes avant la fin, l’aînée des deu