Cinéma

Le secret derrière la porte – sur L’amour et les forêts de Valérie Donzelli

Critique

En migrant au cinéma, l’héroïne du roman d’Éric Reinhardt a changé de nom, perdant la part sombre de Bénédicte Ombredanne au profit de la clarté immaculée de Blanche. Mais l’on aurait tort de se livrer au jeu des sept erreurs entre le film et le roman tant Valérie Donzelli a tordu, avec les encouragements de son auteur et la collaboration de sa co-scénariste Audrey Diwan, le livre vers tout autre chose : un film qui file droit, vif comme le coup de foudre. Avec Virginie Efira en égérie hitchcockienne.

Il y avait, dans la longue ovation qu’a reçu le 24 mai au Festival de Cannes le film de Valérie Donzelli, une vibration étonnamment chaleureuse, comme si la salle du Théâtre Lumière saluait en Virginie Efira une vieille amie.

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Engouement populaire qui redouble la reconnaissance que lui a offert la profession en lui décernant le César de la meilleure actrice pour son rôle dans Revoir Paris d’Alice Winocour en février dernier. Celle qui enchaîne trois films chaque année depuis plus d’une décennie est devenue la star du cinéma français des années 2020, à la fois familière et inaccessible. Familière peut être parce qu’elle a d’abord joué les présentatrices populaires pendant dix ans à la télé avant de figurer dans des comédies populaires.

En bifurquant en direction du cinéma d’auteur avec Victoria de Justine Triet en 2016, sa carrière s’est inscrite dans une véritable politique des actrices. À chaque incarnation nouvelle, elle entraine avec elle ses rôles passés. Déjà prof de lycée dans Les enfants des autres de Rebecca Zlotowski l’an dernier, elle reprend cet emploi dans le cinquième long métrage de Valérie Donzelli qui avoue qu’elle n’aurait peut être pas tourné le film si la comédienne n’avait pas été convaincue par la lecture du roman d’Éric Reinhardt paru en 2014 que la cinéaste lui avait offert en vue de son adaptation. Virginie à la mer, Virginie dans la forêt …

Le « Efira movie » est devenu un sous-genre du cinéma français tant les cinéastes ont aujourd’hui du désir de la changer de peau et d’emploi, de se mesurer à sa stature. Inaccessible, donc. Sa blondeur de velours et sa silhouette robuste et plantureuse lui donnent des airs d’actrice hitchcockienne, réminiscence de Kim Novak. C’est précisément sur cet imaginaire que travaillait le cinéaste Antoine Barraud dans Madeleine Collins en 2021 : un drame familial y piégeait le personnage joué par la comédienne dans le mensonge d’une double vie dont elle ne sortait qu’à la faveur d’une identité factice. C’


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