Littérature

Rédemption d’un salaud ordinaire – sur Western de Maria Pourchet

Critique

Western raconte la collision brutale et banale de deux solitudes qui s’approchent, et plonge, avec les nuances que seule la littérature peut déployer, dans l’inextricable du langage amoureux. Dans ce septième roman, Maria Pourchet déploie une verve sans pitié, au service d’une prose virtuose explosant nos petits arrangements, ce quant à soi sec et mordant.

Un homme, comédien au faîte de sa gloire parisienne, doté de la verve et de l’opportunisme qui vont avec, joue le rôle de Dom Juan au théâtre ; il n’a pas besoin de composer : il aime les femmes, le verbe, le pouvoir que lui donne le second sur les premières.

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La veille du spectacle, il se volatilise, plante l’équipe en prenant la fuite. Western, septième roman de Maria Pourchet, commence à toute vitesse, sur cette disparition inopinée, sur les vanités théâtreuses qu’elle révèle : panique disproportionnée, complaisance sensationnaliste d’un petit milieu, que l’auteur dépeint avec le flegme tranchant qu’on lui connait. En creux s’annonce, surtout, cette intuition : ce n’est pas au théâtre mais ailleurs, que l’événement aura lieu.

L’homme en question, c’est Alexis Zagner : séduisant, infantile dans son besoin d’être aimé de toutes les femmes, systématique à vouloir constamment susciter la passion, manipulateur presque malgré lui. D’aucuns le verraient (le verront ?) comme un parangon de la « masculinité toxique », cible parfaite de #metoo. Maria Pourchet, pourtant, en fait un personnage qu’on n’arrive pas à détester totalement – c’est la réussite du roman –, plus médiocrement humain que bourreau sophistiqué, victime à son tour, d’une vox populi aveugle aux nuances, aux complexités de la passion, aux zones grises où chacun n’est pas, par essence, proie ou coupable.

De ce dernier, elle dit : « encore un qui observe les femmes à travers un calque, les sépare en fonctions et en rubriques, il appelle ça « les comprendre » quand ce n’est qu’un énième fétichisme par abstraction du féminin ». Champion d’échec dans l’enfance, obsédé sexuel à l’adolescence, il est à la fois le prédateur redoutable de l’une, l’homme vraisemblablement providentiel de l’autre, (et sans doute le mauvais souvenir de beaucoup d’autres) ; exhibé dans toutes ses vicissitudes, jamais condamné par son auteur qui, en faisant son portrait à travers les femmes qui l’aiment (qu’il aime ? l’épouse lo


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