Le temps du geste – sur Perfect Days de Wim Wenders
Agent d’entretien de toilettes : voici la profession du protagoniste de Perfect Days, dernier film de Wim Wenders. Tout au long du film, nous suivons Hirayama, interprété par Koji Yakusho, nettoyer d’innombrables toilettes publiques ultra-modernes à Tokyo. Un film d’un ennui total ? Au contraire : un film qui excelle dans ses descriptions fines et poétiques du temps et du geste quotidien.

« Pourquoi les choses doivent-elles changer ? »
Chaque matin, se réveiller au bruit du balayeur qui nettoie la rue, ranger le livre laissé ouvert la veille avant de s’endormir, replier le futon, se brosser les dents, enfiler sa tenue de travail, acheter un café glacé au distributeur, prendre la route et glisser une cassette audio dans le lecteur, descendre de la voiture avec ses seaux et serpillières, inspecter la première toilette, s’agenouiller, frotter, vérifier. Puis reprendre la route, pour la deuxième toilette, la troisième et les autres. Chaque midi, rejoindre le même parc, s’incliner en rentrant, s’asseoir sur le même banc, avec la même voisine, avec le même sandwich, sous le même arbre. Puis reprendre la tournée là où on l’avait laissée, jusqu’au soir. Rentrer chez soi, se changer, sortir se restaurer dans le même restaurant. Revenir, déplier le futon, lire jusqu’à ce que les yeux se ferment.
Perfect Days met en scène la routine, une vie faite de répétitions. Ou plus exactement, de rituels ; car, dans ses plans resserrés sur les gestes et son attention aux sons du quotidien, Wenders montre à quel point cette répétition est chérie par Hirayama. Il y a, dans les gestes répétés par l’agent d’entretien, quelque chose de l’ordre d’une douce conquête. En répétant les mêmes gestes dans les mêmes lieux, Hirayama se fabrique une place dans le monde, il crée son propre espace-temps.
La temporalité qui se fait jour est cyclique : elle n’est pas tendue vers un futur ni même vers un passé. Si Hirayama écoute sa musique avec des cassettes, ce n’est pas par nostalgie de ce qui