Spectacle vivant

Vieillesse, mort et sexualité – premier retour sur Avignon 2024

Journaliste

Particulièrement copieuse, la première partie de cette nouvelle édition du Festival d’Avignon, la deuxième sous la direction de Tiago Rodriguez, est marquée par plusieurs temps forts. Avec notamment Dämon, El funeral de Bergman, d’Angélica Liddell, La vie des vieux, de Mohamed El Khatib et un Absalon, Absalon ! d’anthologie d’après Faulkner, remarquablement adapté et mis en scène par Séverine Chavrier.

La curiosité d’un festival se révèle parfois dans la façon dont les spectacles, sans que cela soit concerté évidemment, y dialoguent entre eux. Quand dans Dämon, El funeral de Bergman, présenté dans la Cour d’honneur, Angélica Liddell assène « Vous ne pensez qu’à baiser, moi je pense à ce qu’il y aura après la mort », alors que de chaque côté de la scène des rangées de fauteuils roulants attendent comme au garde-à-vous leurs futurs occupants, vient aussitôt à l’esprit cet autre fauteuil roulant dans La vie secrète des vieux de Mohamed El Khatib dans lequel une femme plus toute jeune déclare : « Il vaut mieux mourir sur scène qu’à l’Ehpad. »

publicité

Bien sûr il ne s’agit pas ici de comparer ce qui n’est pas comparable, pour autant d’une œuvre à l’autre des résonnances existent. Ainsi à la crudité confondante des propos tenus par les personnes âgées invitées à s’exprimer sur le plateau de la Chartreuse-lès-Avignon par Mohamed El Khatib fait écho la rudesse outrageuse du texte d’Angélica Liddell.

Ces frottements imprévus ne manquent pas d’humour d’ailleurs. Une des héroïnes de La vie secrète des vieux évoque la masturbation dont elle dit que c’est « comme un retour à l’enfance ». Elle raconte alors comment lorsqu’elle exerçait en tant que chirurgienne, il lui est arrivé d’extraire toutes sortes d’objets des orifices anaux ou vaginaux de ses patients. « Une fois j’ai trouvé un crucifix dans un vagin », explique-t-elle. À quoi une de ses partenaires sur le plateau rétorque « c’est un grand classique ! », comme s’il s’agissait d’une banalité. Il ne faut pas tirer de ces propos la conclusion que La vie secrète des vieux est un spectacle égrillard. Même si les femmes et les hommes âgés de soixante-quinze à cent-deux ans présents face au public aux côtés du metteur en scène parlent sans fard de leur sexualité, ce qui ressort de leurs témoignages c’est d’abord un formidable appétit de vie à l’encontre de l’image qu’on se fait ordinairement de la vieillesse. « J’ai quatre-vi


Hugues Le Tanneur

Journaliste