Divisme – sur Maria de Pablo Larraín
« Il ne s’agit pas de jouer un rôle, d’incarner un personnage.
C’est un corps qui tremble, qui se tord, qui tient la pose. C’est un corps possédé. »
Michele Canosa, « Muto di luce »[1]
Entre Jackie (2016) et Maria (2025), l’œuvre de Pablo Larraín commence à dessiner un cycle. Cet effet de cycle est lui-même réfléchi comme tel, le cinéaste faisant appel, dans Maria, à l’acteur Caspar Phillipson, dont la ressemblance frappante avec John Fitzgerald Kennedy avait déjà été employée dans le film biographique consacré à la First Lady.

Ce cycle s’appuie sur des données narratives et formelles qui commencent à faire recette : une star de cinéma se mesure à une figure féminine historique, en l’occurrence Natalie Portman pour Jacqueline Kennedy et Angelina Jolie pour Maria Callas, pendant une semaine charnière – centrée autour de la mort – de la vie de ces femmes. Contrairement aux rôles secondaires, Larraín ne cherche pas de sosies dans ses actrices principales : tout au juste Natalie Portman et Angelina Jolie imitent-elles la diction et l’accent des femmes qu’elles interprètent, mais c’est sans fard, sans grimage qu’elles les incarnent.
Jacqueline Kennedy-Onassis comme Maria Callas ont accumulé avec elles nombre d’images médiatiques à partir desquelles Larraín compose ses portraits. Ainsi en est-il de la visite télévisée de la Maison Blanche par Jackie, reproduite en noir et blanc dans un film couleur, moment charnière dans la construction de sa figure médiatique. Dans Maria, le cinéaste chilien renvoie au générique de fin les très riches archives filmées de la chanteuse lyrique, dont les home movies qu’elle a tournés – objet du film Maria by Callas de Tom Volf sorti en 2017 –, comme pour assumer son parti pris de fiction, celui d’imaginer la dernière semaine de la colorature entre son appartement place Vendôme et des répétitions confidentielles pour retrouver sa voix.
Dans un premier mouvement, une aria entonnée sur scène par la soprano donne lieu à un défilement