Cinéma

La Croisette, nid d’espions – deuxième semaine du 78e Festival de Cannes

Critique

Dans un contexte politique préoccupant, qui pèse notamment sur la création cinématographique, il est bon de voir que des films questionnent les pouvoirs proprement politiques de l’image. C’est le cas de trois films de la Compétition officielle du Festival de Cannes, qui utilisent l’espionnage non seulement comme un ressort narratif porteur, mais aussi – et surtout – comme une métaphore féconde du 7e art.

En l’espace de quelques jours, trois films d’espionnage sont venus parler des relents de dictature qui agitent le monde. En Égypte, au Brésil, en Iran, le contexte politique autoritaire, des années 1970 à aujourd’hui, drape des fictions dans lesquelles le thriller est le seul récit qui puisse rendre compte de la paranoïa diffusée dans la société.

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Entremêlant questions de représentation cinématographique et duplicité sociale imposée par les pouvoirs totalitaires, trois films d’habitués de la Compétition officielle dialoguent abondamment, en plantant en vigie des espions qui traquent les faits et gestes des opposants réels ou putatifs. Interdit de séjour dans son pays d’origine, Tarik Saleh a tourné en Turquie le troisième volet de sa trilogie cairote, après Le Caire confidentiel et La Conspiration du Caire. Kleber Mendonça Filho réssucite la dictature des colonels pour mieux parler du regain liberticide imposé par Jaïr Bolsonaro au Brésil. Jafar Panahi revient par la fiction sur des mois de prison avec Un simple accident, dont le récit de la fabrication pourrait lui-même faire l’objet d’un film noir. Tourné dans une semie clandestinité, puisque le cinéaste n’est plus interdit de filmer par le régime mais que ce film-là n’a pas non plus obtenu l’autorisation de la censure d’État, Un simple accident a, murmure-t-on, voyagé jusqu’à la salle de projection du Grand théâtre Lumière sur un disque dur crypté dont le cinéaste ne connaissait délibérément pas la clé.

De fait, ces trois films qui témoignent d’une grande maîtrise de mise en scène, combinent le film noir et la comédie dans des scénarios qui s’inspirent de faits sinistrement réels qu’ils métamorphosent en matière cinématographique, brassant ainsi les tons entre le suspense et l’humour.

Le paradoxe sur le comédien

On pourrait croire que deux films coexistent dans Les Aigles de la République : une comédie de tournage sur Georges Fahmy, une star ringardisée et un récit d’espionnage dans l’Égypte de Al-Sissi,


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