Critique

Écrasée sous un satellite… La position est aussi peu confortable qu’incongrue. Mais écrasée ne veut pas dire écrabouillée. Peut-être existe-t-il un moyen de se sortir de là. On se demande d’ailleurs pourquoi l’aéronef n’est pas en orbite et comment a-t-il fait pour atterrir sur le dos de celle qui s’efforce de soulever l’engin sous lequel elle est coincée. En intitulant sa nouvelle création Honda Romance, présentée en septembre à la Comédie de Genève où elle est artiste associée, Vimala Pons suggère-t-elle qu’il existerait une relation affective entre cette femme et la machine – de marque Honda – comme d’autres s’amouracheraient d’un robot ?

Il y a dans le poids de ce tas de ferraille, conçu pour évoluer en apesanteur, une contradiction que soulignent les capteurs dont la forme évoque des ailes et dont l’aspect anthropomorphe avec ses lumières comme des phares, ou des yeux, laisse entendre qu’il pourrait s’agir d’un ange tombé sur terre. Sans oublier que doué de la parole il est assez loquace. Donc on a à la fois une machine et un être mythique paradoxalement soumis l’un comme l’autre à la gravité à laquelle ils sont par définition censés échapper. On pense à l’albatros de Baudelaire que « ses ailes de géant empêchent de marcher ». Or là c’est un engin en panne doublé d’un ange déchu qui couvrent le corps de celle, interprétée par Vimala Pons, qu’ils empêchent pratiquement de respirer.

Cette question de la respiration ainsi évoquée dès les premiers moments du spectacle n’est pas anodine. D’une part parce que le souffle a un lien étroit avec les émotions, dont certaines justement coupent le souffle ; et d’autre part parce que les émotions occupent une place essentielle dans cette création où régulièrement la performeuse a besoin de reprendre haleine. C’est en tous cas le souffle court ou entravé par ce poids qui l’oppresse qu’on la découvre, comme si elle était entrée plus ou moins malgré elle en contact avec cet objet imposant venu du ciel. Si la dimension