Art Contemporain

François Curlet : « Le marché n’est que la banlieue de l’art »

Curatrice

Plasticien mais aussi vidéaste, François Curlet procède souvent par associations, tant visuelles que verbales, inscrivant son œuvre dans une tradition d’ironie et de sarcasme qu’il prend un malin plaisir à réinventer. La double actualité d’une importante exposition monographique au Grand-Hornu et d’une autre, plus petite, dans sa galerie parisienne, offre l’occasion d’un long entretien avec cet artiste français mais belge d’adoption.

Plasticien, François Curlet est aussi ciné-vidéaste. Il joue avec les mots et les signes politiques, économiques et culturels de la société contemporaine, utilisant des mécanismes d’associations visuelles et verbales. Il opère de légers déplacements semblables à ceux observés depuis Freud dans la formation des rêves et des mots d’esprit. L’ironie et le sarcasme prennent à rebours nos habitudes de spectateur et parviennent à modifier notre regard sur l’art contemporain : c’est là une des clés du travail de François Curlet, permettant la rencontre avec le public. Rencontre à l’occasion d’une grande exposition monographique au Musée des arts contemporains du Grand-Hornu (Belgique) jusqu’au 10 mars et d’une exposition dans sa galerie, Air de Paris, qui ouvre ce 1er février.

Le titre de l’exposition au Grand-Hornu, Crésus & Crusoe, renvoie directement à une figure très souvent présente dans votre travail : l’oxymore. Comment l’expliquer ?
La figure de l’oxymore est antique. Et, en effet, j’aime assembler dans un seul objet des éléments opposés, yin / yang, chaud / froid, souple / dur… C’est une composante omniprésente à différents niveaux et qui adopte des formes diverses. Je récolte, c’est comme un voyage dans une fable de La Fontaine grandeur nature. Le Surf Canadien (une planche de surf en bois), Jumbo (un gourdin en plastique creux fermé par un bouchon de bouteille de Coca Cola), Placenta (une affiche de mai 68 collée sur un emballage d’écran plat), Pieds de biches araignée (une toile d’araignée composée de pieds de biches soudés) ou Saboosh (une paire de sabots en bois pyrogravés d’une virgule Nike) en sont quelques exemples, il y a aussi Crèpe Suzette (une lourde pierre dans un vase en cristal)…

Belge d’adoption, comment voyez-vous aujourd’hui la situation de l’art dans ce pays ?
Bruxelles, où je vis depuis 30 ans, où j’ai passé une grande partie de ma vie d’adulte, de ma vie artistique, cette ville est un oxymore par nature. J’y vois une situation déréglée qui n’est pas sans raison liée au surréalisme belge, car il existe quotidiennement ici, mêlant le rêve et l’agitation. Prise entre trois régions et deux communautés, la force créatrice de la Belgique n’est pas à démontrer, mais la capitale est engluée dans un conservatisme assez bourgeois dans son rapport à l’art. Cela est très présent, contrairement à l’image qui circule du bruxellois débonnaire et décontracté, à l’opposé de la figure du parisien bavard et gesticulateur. La bonne humeur confortable peut aussi être conservatrice.
Le mythe du collectionneur-belge-explorateur est fondé sur une nostalgie. En réalité, cela s’est joué dans les années 60 et 70 avec une poignée d’acteurs comprenant des galeries, des passionnés et des mécènes. Aujourd’hui, il en reste quelques soubresauts grâce à des galeries et des lieux d’expositions plus ou moins éphémères. C’est une image passéiste qui fait foi par une sorte de validation du même niveau que les pralines. La distribution de l’argent passe par le picorage pour la poignée de survivants artistiques du moment, invités à l’heure du goûter. Ce manque d’énergie et de partage bloque une grande partie des candidats aux expositions. Une vague importante de jeunes artistes arrivent à Bruxelles pour la douceur de vivre mais rapidement, une fois les cacahouètes consommées, les jeunes ne peuvent compter que sur leurs semblables. Ils s’y épuisent et souvent s’éjectent de la scène locale. Précédemment, des artistes de plusieurs générations ont été ensevelis vivants, sauf une minorité de chanceux.
La Belgique, de façon générale et artistiquement, est défaillante et magique à la fois, sous les gaufres la jungle mentale. On est loin de la culture du garde-à-vous français. Il convient aussi d’ajouter que le pays connaît de gros soucis avec une poussée de fièvre identitaire en Flandres, une plaie avec des conséquences potentiellement spectaculaires pour le pays.

Dans l’étonnante affiche de l’exposition au Grand Hornu, vous vous mettez en scène comme un naufragé déguenillé sortant des flots, un peu comme le Boudu du Boudu sauvé des eaux de Renoir. Un Boudu chiffonnier qui reviendrait de loin. D’où vient la référence dans le titre à la figure de Robinson ?

Le titre sur la couverture et celui de l’exposition était d’abord FREE CURLET. Il s’est transformé en FREE WILLY en plaisantant puis je me suis mis en scène entre le marsouin et le réfugié. C’était un coup de tête, ce n’est pas une habitude que d’utiliser mon image. Finalement, par l’effet comique c’est cette option qui est restée. Pas plus grotesque qu’une affiche d’homme politique. 
Il faut s’échapper. Le milieu culturel est colonisé par la mise aux normes et les garde-à-vous. Deux mots d’ordre ont pollué la situation : « Toi, produit ! » et « Toi, connu ! » La docilité et l’amnésie concernant l’histoire de l’art récente ont explosé, dans le sens de la soumission, avec tendance à l’exclusion. Un pseudo club d’initiés pense régir les règles, quand la situation des avant-gardes n’est pas si difficile à comprendre : créer de la liberté pour se libérer. C’est devenu à posteriori une recette opportuniste pour produire. On ne prend plus aucun risque, on s’appuie sur le passé pour justifier une valeur. Une récupération conservatrice a envahi le terrain via le marché, entre autres. La dimension de l’art ne peut être ramenée à une recette-minute avec des figures historiques citées à tout-va pour prendre la pose. Une avalanche éphémère n’est qu’un euphémisme. Le marché de l’art n’est que la banlieue de l’art. Il peut disparaître, l’art restera. Sur la plage, en attente de rencontrer des Vendredi.

On peut déduire de vos réponses que la renommée vous importe peu, voire même qu’elle vous dérange. La figure de l’ermite ou du stylite devient-elle alors une référence ?
Une donnée de la renommée inclut une part de docilité collective qui me dérange. Quand elle est activée uniquement sur l’image de l’individu, elle flirte avec le morbide. Quand la résonance d’un sujet émetteur se produit de par sa qualité, ce partage aux racines adolescentes est plus sympathique et porteur de joie. La figure de l’ermite est une référence plaisante et facile pour peu qu’elle ne soit pas pratiquée à la lettre. C’est un refuge fantasmatique pour se défaire de la lourdeur de l’homme, pour citer Céline. Les promenades à dos d’éléphant des stylites sont séduisantes, un bon moyen pour ne pas toucher terre en utilisant le poids de l’éléphant, mais la figure surplombante d’un stylite en saint ou juge de ligne a une connotation morale délicate. De façon hasardeuse, en écho à ces ermites, j’ai fait un projet où des empreintes d’éléphants fusionnent avec des plaques d’égout moulées en bronze (Infrabasse, 2018).

L’art est-il un outil de combat ?

Non, c’est un sas pour respirer et reprendre ses esprits afin de nourrir une motricité.

La transmission artistique vous intéresse-t-elle ?
J’aime bien rencontrer des artistes quel que soit leur âge, partager des informations et apporter des occasions d’expositions ou simplement aider à entrer dans le milieu pour justement ne pas fétichiser une corporation soi-disant détentrice de droits d’entrée.

Il y a une vitrine marine dans l’exposition, une suite « d’objets de plage » en plastique, bidons, os, coquillages et divers signes venus des eaux. Ce qui fait encore référence à Crusoé ? Et Crésus dans tout ça ?

Les objets récoltés sur la plage ou dans la rue sont des rebuts, des fossiles industriels récupérés à marée basse dans les deux cas. 
Crésus perdra tout, Crusoé perd tout et retourne à la case départ, les deux sont faits. C’est Vendredi qui est libre au final et qui fait avancer la partie. Crésus, ce n’est pas le modèle. La force, ce sont les outils et l’invention, l’économie chaude.

Dans « Homeless is more », vous êtes sur un lit d’hôpital en animal. La part animale apparaît comme une constante dans votre travail…
Oui, je me vis comme un animal, je vois tous les bipèdes comme des animaux, avec leurs curiosités, colères, désarrois, vanités, conditionnements, déprimes et désirs. L’usage d’animaux vivants questionne directement nos comportements avec leurs automatismes culturels.

Dans le catalogue édité par Triangle Book, figure en exergue un collage de jeunesse, un portrait de Freud trépané, intitulé « After Eight ». Manière d’indiquer que la psychanalyse est au programme de l’expo. Quelle est la part de l’inconscient et des rêves dans votre recherche artistique ?

J’aurais préféré ne pas apprendre à parler, je n’ai pas aimé l’école, on m’a ouvert de force à la socialisation. Je détricote avec les moyens du bord et la joie liée à la découverte et aux impulsions qu’elle engendre. L’alliage de l’énergie et du vivant. J’utilise cette référence à l’analyse au même titre qu’un slogan publicitaire d’un paquet de Pépito par exemple. Je fais mes courses dans la mémoire commune.

Votre travail prend la forme d’un engagement, d’une critique politique mais poétique de la société de consommation. On peut penser, par exemple, aux œuvres en 3D, Mildo, TV set, X RAY, le film L’Agitée, etc. Tout semble signe pour vous, tout est phénomène. Il n’y a pas de bons ou mauvais sujets. Peut-on dire qu’il y a la façon, la forme avant tout ?
Depuis l’usage de la taxinomie avec l’encyclopédie de Diderot et d’Alembert, il y a de partout des objets qui interpellent. On baigne dans la forme, elle s’impose en permanence tant que l’on n’est pas aveugle. Il faut la saisir et la tordre, ne pas la croire sur parole, car derrière chaque objet-signe il y a un programme.

L’exposition est construite comme une échappée belle, un appel d’air, un chemin insolite, perturbant et léger à la fois, composée d’aphorismes visuels cinglants, mais aussi musicaux. Vous ne perdez jamais l’occasion de télescoper les signes et de bousculer nos habitudes. Tout prend la forme d’une réflexion critique et formelle sur l’histoire et l’art et la société avec une syntaxe et un vocabulaire formel implacables. L’histoire de l’art est-elle toujours présente consciemment dans votre esprit ?
Pas spécialement, mais c’est la plus importante forme d’éducation que j’ai reçue, alors ça résonne forcement. Il ne faut pas oublier qu’il y a un cadre culturel même dans la volonté de prendre la liberté de parole. Il n’y a pas que Vendredi mais tous les jours de la semaine et le week-end.

Vous inventez des mots, pratiquez les mots d’esprit, les Witz, les onomatopées sonores, les mots-valises mais vous produisez aussi des peintures métalliques à partir de chutes industrielles recyclées au pochoir (Frozen Feng Shui), vous utilisez des objets que vous libèrez de leur carcan habituel, vous opérez des montages radicaux, désopilantx et euphorisantx pour vos films, sans hiérarchie aucune et en portant souvent un regard tragi-comique… Vous vous permettez tout ? Vous fixez-vous des limites ?

Je ne me pose pas la question de limites, sauf celle de ne pas agresser les vivants physiquement, le reste m’importe peu.

Vous utilisez la musique dans vos films, du son qu’on imagine parfois sorti de vos objets, comme un matériau ou une couleur à part entière…
Oui, une globalité : couleurs, images, sons, odeurs, toucher. L’expérience permanente des sensations est un lot quotidien, la promenade ressemble à celle de la Google car qui capte, spectre ouvert, les informations sur son passage, y compris le sens, par les phrases et les mimiques d’autrui. Cette récolte remplit un petit juke-box mental des impressions et mémorisations, avec la possibilité de sampler ces impressions comme par synesthésie. Être céphalo-bipède.


Certaines de vos œuvres sont des incarnations de choses impossibles à voir à l’œil nu, je pense aux Lens Flair, mobiles matérialisant un effet optique lumineux indésirable et irisé dans les objectifs des appareils-photo ou à l’œuvre récente X Ray, des valises passées sous rayons X des systèmes d’inspection de bagages. Est-ce un fantasme que vous réalisez là ?
Le besoin de voir au travers des murs, des cerveaux, des mécaniques mentaux, une séance de spiritisme portative proche de celle du smartphone, en permanence dans ma poche. Mentaliste et animiste de la mise en scène du quotidien. Question fantasme, j’ai pu faire rentrer un singe bonobo la nuit dans le magasin Printemps du boulevard Haussmann et le filmer (Crème de singe, 2004).

Le 17 janvier dans le cadre de l’exposition, vous avez fêté l’Anniversaire de l’art ? Est-ce une sorte d’hommage à Robert Filliou (que vous collectionnez) ?
C’est Robert Filliou qui a imaginé une naissance de l’art dans des temps ancestraux, une légende humaine fabriquée de toutes pièces, une coutume. Elle a été suivie comme n’importe quelle coutume religieuse. En effet, j’ai collectionné les éditions de Robert Filliou, à la façon d’un Cluedo pendant une convalescence. J’ai recherché les éditions comme un Columbo à travers le monde. Le but : raccourcir l’espace qui séparait les éditions entre elles, une unicité due à leur rapprochement, comme ce sont des éditions. Une petite meute près du foyer.

Vous écrivez souvent des textes sous forme de SMS, que vous avez publiés en recueil. Vous avez publié de nombreuses éditions d’artistes. Vous utilisez le langage dans vos œuvres, écrivez des scénarios de courts et longs métrages. Quelle place tient l’écriture en général dans votre travail ? Quels sont les livres que vous aimez et qui vous influencent ?
Oui, je me suis rendu compte que j’aimais écrire, mais ça me coûte un peu, comme si j’allais en salle de gym. Une fois sur le vélo, je pédale. Pour les livres, il y en trop et pas assez que j’ai lus, j’aime des choses très diverses, c’est trop dur d’arrêter un nom. Idem pour les films. Là, je pourrais en citer un que je trouve exemplaire, Mon oncle d’Amérique de Resnais avec la collaboration de Henri Laborit.

Dans votre travail plastique, mais aussi dans vos films, vous aimez bien faire des arrêts sur signes, sur mots, comme on parle d’arrêts sur images. Diriez-vous que votre œuvre tend de plus en plus vers le cinéma ?

Les images animées sont pour moi très liées au pantomime avec une résonance sociale et une anthropomorphisation du quotidien. L’histoire des images est infinie. Elles produisent sur l’homme des rituels et leur interprétation s’avère un mélange d’évidences et de causes insondables. J’ai une distance avec le cinéma qui prêche des règles d’usage des images sous prétexte qu’elles tirent leurs droits de la réalité. Ceci laisse passer parfois un ton professoral qui ne doit pas oublier la dimension carnavalesque de la mimique. C’est un peu lié au fait d’écrire. A ma surprise, j’aime faire des films et suis à l’aise avec ce mode de production. Je ne m’y attendais pas du tout, je voulais rester vagabond pour la légèreté de production de l’art. Faire des œuvres ce n’est pas lourd, les montrer non plus, il s’agit d’un tout petit corpus de personnes pour mettre en place les expositions. Pour les livres, écrire ne coûte rien matériellement mais ensuite les comités de lectures, éditeurs etc., c’est une autre affaire, ce n’est de toute façon ni mon but ni ma vie. Le cinéma est pire, pourtant, je me retrouve à vouloir faire ça, j’ai été piqué par ce démon dès ma première expérience. Une sorte de crack légal. Mais la complexité de la mise en forme s’approche paradoxalement de celle la vie. C’est ce qui est excitant, retrouver le vivant par la complexité de la reproduction et l’épurer par le film.

Pourquoi avez-vous eu envie de travailler avec les graphistes M/M pour les affiches de l’exposition ?
Avec les M/M on s’est rencontré il y a 22 ans et on est devenu amis avec aussi un goût commun pour l’utilisation de différents territoires artistiques. Je n’ai pas leur flexibilité et leur capacité de circulation sociale pour accélérer et pénétrer ces territoires par la production. Je reste à l’état de prototype, sans cahiers des charges.

Les collaborations artistiques sont nombreuses et éclectiques dans votre œuvre : films, musiques, éditions, affiches, liens avec votre galerie Air de Paris mais aussi avec des personnes qui suivent et soutiennent ton travail depuis longtemps…
Les liens se font et se défont, sans forcer. Dialogues et échanges d’opinions amènent parfois à un passage à l’acte artistique, pas à la manière d’une relation intime, mais on peut faire un parallèle. 
Il suffit de quelques personnes, fidèles dans la durée et convaincus que l’on travaille pour dire et non pour faire du bruit. Cela aide à tenir les vents contraires. Commissaires d’expositions, amateurs d’art, l’important est qu’ils aient une motricité intérieure indépendante. Pas de phénomènes d’attente ou d’intention d’investissements basés sur un étiquetage. Devenir visible, très visible ou errant, pour peu que la structure de pensée reste étanche à ces anecdotes sociales. Il arrive que l’on soit un cheval qui déçoit les amateurs munis de jumelles discrètes, pas assez docile le dada, ruade… 
Il y a des collaborations avec des artistes plasticiens et d’autres secteurs artistiques : le théâtre, le cinéma arrivent selon l’évolution du travail. 
Le temps est important, la durée aussi. Les langages de base se mettent vite en place mais il faut parfois du temps pour développer un détail. D’où le mythe des artistes productifs et doués qui disparaissent jeunes, dont la production est rigoureusement marketée. La mort rassure le commerce car le travail ne changera pas, son image stable est garantie par l’éternité.

L’exposition Crésus et Crusoé se termine par quatre vidéos que vous avez tournées comme des pilotes de longs métrages. Elles sont indépendantes mais présentées sur les quatre murs d’un grand cube noir, en alternance, comme un quatuor, comme si elles étaient reliées entre elles et constituaient un ensemble cohérent.

Les films sont indépendants, en effet. Cependant, vu qu’il s’agit de saynètes, il existe un potentiel d’assemblage par le public. Des éléments d’une série souple qui partage le climat d’autres projets, comme un film à sketches. Le tournage réunit les conditions d’un premier film d’auteur. Les films sont le résultat d’accumulations senties en général, de réflexions diverses et d’images passées. Un mécanisme de chute soude les multiples entrées pour les courts métrages, les champs sont démultipliés ce qui provoque une sensation de logique flottante coriace. 
Dans Jonathan Livingston, le corbillard errant cherche son client, c’est l’occasion de panoramiques anxieux, deux personnages, le conducteur et le véhicule, la Jaguar type E inspirée par la comédie dramatique de Hal Ashby, Harold et Maude.
Dans le film The Yumi Patriot, le hussard est un déserteur bercé par la lumière d’une bougie, stressé par la musique martiale et réconforté par sa tartine de pâté.
Pour L’Agitée, une executive-woman agitée dans ses pensées fume le cigare et part dans la fumée pour une réinterprétation du joueur de flûte de Hamelin.
 Air Graham, se déroule dans un parc de sculpture contemporaine, les jardins du Kröller–Müller Museum. Deux mimes s’adonnent à une déambulation autour des deux pavillons, ils les agrandissent et matérialisent ainsi l’influence de Dan Graham, une référence majeure pour l’art après les années 60.

En parallèle à ces derniers courts métrages, vous présentez un Trash-Catcher, une sculpture suspendue à la galerie Air de Paris, pouvez-vous la décrire ?
Trash-Catcher est une version déviante des Dream-Catcher qui attrapent les rêves perdus, ce qui leur confère un statut de déchet de l’inconscient. Cette version intègre des déchets de packaging domestique. C’est comme une version matérialiste de l’inconscient.

L’humour (noir parfois) est omniprésent dans votre travail, il est moteur…
Le réel garni d’humains est le meilleur maître pour l’apprentissage de l’humour noir. On est arrivé malgré soi, et commenter cette réalité imposée est une option lors du trajet parmi les vivants, un bouton de ralentissement. Le timing non-assujetti aux volontés d’autrui permet de se sentir libre malgré la trajectoire imparable de chacun. L’humour noir, désodorisant du tragique.

Madeleine Santandréa-Toussaint

Curatrice, Critique

Rayonnages

Arts plastiques