Art contemporain

Nina Beier : « Je ne fais pas de distinction entre la sculpture et la performance »

Critique d'art et commissaire d’exposition

Avec l’exposition « Auto », présentée au Capc, musée d’art contemporain de Bordeaux, l’artiste danoise Nina Beier pose un regard rétrospectif sur sa pratique singulière de la sculpture et de l’installation. Dans cette grande halle qui fut, jusqu’au milieu du 20e siècle, un entrepôt de stockage de marchandises, ses assemblages décortiquent l’histoire d’objets qui voyagent et enchevêtrent leurs récits.

Depuis une quinzaine d’années, le travail de Nina Beier – et celui du duo qu’elles ont initié avec l’artiste Marie Lund – se distinguent dans le paysage de l’art contemporain en Europe à travers des interventions sculpturales et performatives qui explorent les gestes que nous effectuons, et les objets dont nous nous entourons. Chaque œuvre nous interpelle par la transformation d’un objet familier ou par un assemblage inattendu, et cristallise une image inédite – drôle ou étrange – qui nous donne matière à penser la société occidentale aujourd’hui. La pratique artistique de Nina Beier se nourrit des inventions sans cesse renouvelées de notre monde hypermatériel, et en défait les hiérarchies. L’invitation de Cédric Fauq et Sandra Patron, co-commissaires de l’exposition au Capc, à imaginer une rétrospective de son travail, offre l’opportunité à l’artiste et aux spectateur∙ice∙s de plonger dans ce fabuleux capharnaüm d’objets, de tisser des liens entre les œuvres, et de mettre en évidence les motifs qui sous-tendent leur apparente hétérogénéité. VD

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Vos deux expositions au Capc, musée d’art contemporain (Bordeaux) et à Kiasma (Helsinki) jettent un regard rétrospectif sur votre pratique sur une période de 15 ans environ. Est-ce la première fois que vous vous livrez à un tel exercice ?
Je travaille depuis deux ans sur une monographie qui sera publiée par Hantje Cantz, à temps pour le vernissage au Capc. Le processus de sélection des œuvres pour ces expositions a été guidé à bien des égards par le travail sur le livre, pour lequel j’ai systématiquement regardé en arrière, cartographié mon travail artistique et déterré d’anciennes œuvres.

Le fait d’établir des liens entre des œuvres qui n’ont pas été réalisées en même temps, de reconsidérer des œuvres passées dans un contexte différent apporte-t-il quelque chose de nouveau à votre pratique ?
Oui, c’est passionnant de tout rassembler et d’être capable de repérer des modèles, des motifs et des stratégies dont je n’étais pas consciente et qui se répercutent au fil des ans. Et je me sens chanceuse de ne pas être obligée de raconter une seule version de l’histoire, mais au contraire de pouvoir l’ouvrir et de créer deux chemins complètement différents à travers l’œuvre et qui, je l’espère, se compléteront l’un l’autre.

Comment avez-vous réagi à l’invitation des commissaires Sandra Patron et Cédric Fauq de présenter cette exposition dans le hall principal du Capc, qui a été construit dans la première partie du 19e siècle et qui était à l’origine un entrepôt de denrées coloniales (l’Entrepôt Lainé) ?
Pour l’exposition à Kiasma, la sélection d’œuvres s’est beaucoup concentrée sur la question du travail et des corps, avec un accent particulier sur l’image du genre. Mais il y a aussi un grand nombre de mes travaux qui abordent la formation de la valeur, les objets itinérants, l’extraction des matières premières et l’impact des différentes réalités géopolitiques sur la vie des produits, que je voulais aussi décortiquer (littéralement). Compte tenu de l’histoire du bâtiment, il m’a semblé qu’il n’y avait pas de meilleur endroit que le Capc pour présenter ce corpus d’œuvres.

Vous avez montré dans votre pratique à quel point la relation à l’espace peut être décisive, en particulier en ce qui concerne l’échelle. Je pense à la relation de votre travail à la monumentalité, en utilisant de très grands objets manufacturés ou, au contraire, en travaillant avec de très petits objets tels que les insectes fonctionnant à l’énergie solaire de Protein. Comment avez-vous abordé cette salle monumentale – que les gens appellent « la Nef », en référence explicite à l’architecture d’une église – pour la présentation de cette rétrospective ?
Vous avez raison, cet ancien entrepôt ressemble davantage à un lieu de culte. L’architecture semble également dicter la manière dont une exposition doit fonctionner dans cet espace, à la fois à hauteur de vue et vu d’en haut. La plupart de mes pièces existent en série et, en découvrant l’espace depuis ces galeries du premier étage, j’ai eu la vision d’une sorte de jeu de société créé par les différents groupes d’objets, une sorte de version hybride de Donjons et Dragons ou du Monopoly. C’est ainsi j’ai eu l’idée de recouvrir l’espace d’une moquette blanche sur laquelle les œuvres sont exposées. Et je suppose que les relations de pouvoir qui sont enracinées dans l’histoire de chaque pièce, dans chaque objet, même le plus neutre, ont conduit au sentiment que ces objets ne sont pas seulement mis en dialogue les uns avec les autres, mais qu’ils se battent peut-être aussi les uns contre les autres. Dans ce contexte, cette réflexion m’aide à structurer les relations entre les différentes œuvres.

Cette moquette délimite-t-elle un espace unique pour l’exposition ? Comment les visiteurs pourront-ils circuler parmi les œuvres ?
Les visiteurs pourront marcher sur le tapis et s’approcher très près des œuvres, soit en enlevant leurs chaussures, soit en utilisant des surchaussures. La moquette est également là pour que les gens s’assoient et passent du temps dans l’espace avec les œuvres, pour ralentir le rythme. Beaucoup des objets avec lesquels je travaille proviennent du domaine domestique. Le tapis aide donc à faire un voyage mental depuis l’entrepôt jusqu’à la destination des objets, leurs différents usages.

Ce mode d’exposition place les œuvres à proximité les unes des autres ; essayez-vous également de jouer avec la porosité entre les œuvres ? Comment peuvent-elles s’influencer mutuellement ?
Je pense que je m’appuie beaucoup sur cette porosité. J’ai tendance à créer de nouveaux chevauchements entre les œuvres lorsque je les installe. Par exemple les différents types d’œufs en pierre ont initialement été installés sur le sol, puis ils se sont retrouvés dans les baignoires lors d’une exposition précédente, et c’est maintenant comme ça qu’ils sont montrés. Les perruques ont d’abord été montrées aplaties sur les tapis Wagireh, avant de se retrouver dans les voitures télécommandées. Comme nous travaillons dans un grand espace ouvert, il est impossible d’isoler des éléments : l’enjeu de l’exposition au Capc est de tisser toutes les œuvres ensemble.

La performance tient depuis longtemps une place importante dans votre pratique. Quel rôle joue cet aspect performatif de votre travail dans cette nouvelle exposition ?
Je ne fais pas vraiment de distinction entre la sculpture et la performance, car je travaille aussi bien avec des objets trouvés qu’avec des comportements identifiés. Certaines des performances qui ont une place clé dans ma pratique, comme le chien qui fait le mort, traitent du transfert entre le vivant et la mort, l’animé et l’inanimé, c’est-à-dire la sculpture en quelque sorte. L’une des pièces de l’exposition, qui consiste en un système de livraison de légumes, joue sur le mouvement inverse. Les légumes sont livrés et présentés sous la forme d’un étalage faisant référence à une « corne d’abondance ». Mais chaque fois qu’un légume commence à flétrir, à se dégrader, il est remplacé par un autre, et de cette manière, le nouveau remplace l’ancien, produisant une image continue.

Le titre de l’exposition, Auto, est lui-même emprunté au titre d’une de ces pièces qui « prend vie » par le biais d’une activation. Comment cette pièce éponyme fonctionne-t-elle ? Comment sera-t-elle activée dans l’exposition ?
L’œuvre consiste en une série de voitures-jouets qui sont télécommandées. Elles ne roulent pas à tout moment, mais elles ont ce potentiel. Elles fonctionnent comme des sculptures immobiles et, par moments, elles se déplacent. Elles existent en groupes et répondent à la même fréquence, de sorte qu’elles se déplacent à l’unisson et créent une étrange chorégraphie. Une autre performance intitulée Prince sera présentée lors de l’ouverture de l’exposition. Dans cette pièce, des personnes aux cheveux gris soufflent des ronds de fumée.

L’une des pièces les plus anciennes de cette exposition est également une performance, The Complete works, que vous avez réalisée en 2009. Qui est le danseur ou la danseuse qui interviendra au Capc ?
Je suis très heureuse de pouvoir présenter cette pièce dans le cadre de cette exposition rétrospective car c’est la scénographie parfaite pour qu’un danseur ou une danseuse à la retraite se souvienne et rejoue devant le public toutes les chorégraphies exécutées au cours de sa carrière. Au Capc, la danseuse qui incarnera la pièce est Nadi Malengreaux.

Pour en revenir au manque de pertinence de la distinction entre sculpture et performance dans votre pratique, je m’interrogeais sur la pièce Mosquito. Cette œuvre reste invisible car elle consiste en un dispositif sonore qui transmet un son à haute fréquence et ne peut être entendu que par les personnes de moins de 25 ans. Elle révèle l’importance des questions politiques qui traversent votre travail, notamment la manière dont la société marginalise certaines catégories de personnes et trouve des moyens invisibles – et donc particulièrement pervers – de contrôler les espaces publics. Comment les jeunes visiteurs réagissent-ils à cette pièce ?

Ah ! Ils ont tendance à partir…

Concernant les œuvres qui jouent sur l’idée du vivant, j’étais curieuse d’en savoir plus à propos de l’œuvre Protein que vous avez réalisée en collaboration avec Simon Dybbroe Møller. Comment cette œuvre a-t-elle vu le jour ?
C’est en cherchant autre chose que nous sommes tombés sur un certain nombre d’insectes en plastique fonctionnant à l’énergie solaire. Les petits panneaux solaires bon marché permettent aux petits objets de se déplacer, et cette catégorie d’insectes solaires a donc vu le jour sans autre raison apparente. Mais il s’agit d’un objet fortement métaphorique qui parvient à concentrer toutes ces visions contradictoires de l’avenir : le plastique et la surproduction, les infestations d’insectes post-apocalyptiques, l’énergie propre et peut-être l’avenir de l’alimentation humaine. Cette œuvre interagira avec des aspects spécifiques de l’architecture du Capc, notamment les fenêtres très hautes qui créent des zones de lumière définies au rez-de-chaussée. Lorsque la lumière d’une chaude journée d’été atteindra les insectes, ceux-ci se mettront à bouger. L’absurdité inhérente à cet objet fait écho à un autre objet dans l’exposition : les serviettes de plage représentant des billets de banque. On se demande comment ces deux objets ont pu se rencontrer, la serviette de plage et le billet de banque. On en trouve partout et toutes les monnaies sont représentées. Cela semble être l’une des idées les plus absurdes. Pourtant, elle rend explicite la réalité de l’économie du tourisme et des loisirs comme enjeu social et politique.

Cette exposition fait ressortir avec une grande clarté le fait que votre travail fonctionne à différents niveaux. Il semble qu’il permette des lectures et des interprétations assez complexes, liées à l’économie mondiale et au capitalisme financier, aux histoires coloniales et néocoloniales, ou à des comportements humains caractérisés par la domination et la domestication. Cependant, je pense que l’on peut également aborder votre travail d’une manière beaucoup plus intuitive, à travers des associations entre des objets et des images qui nous sont familiers. L’humour joue également un rôle important. Quelle importance accordez-vous à la coexistence de ces différentes façons d’appréhender votre travail ?
Je me suis intéressée au chemin parcouru par un objet entre l’intention avec laquelle il a été fabriqué et son utilisation finale. Chaque objet porte les marques de ce voyage. Ma curiosité s’accroît lorsque je découvre que les objets sont fabriqués à de nombreuses reprises et dans différents contextes. Par exemple, le lion gardien est un objet très ancien qui a voyagé autour du globe et a pris différentes formes, a muté et a été façonné par différentes influences… Ce voyage complexe à travers le temps, l’espace et les cultures est visible dans les objets eux-mêmes. Ces couches de sens s’ajoutent au fur et à mesure qu’un objet est répété et j’essaie de les rendre explicites en créant des dialogues avec d’autres objets. J’essaie d’ouvrir l’objet, de le faire parler, mais pas nécessairement d’une manière « logique ».

Et il me semble que cette conversation fonctionne à un niveau matériel, physique.
Oui, c’est très vrai, j’essaie de laisser les objets trouver leurs propres interlocuteurs. En ce qui concerne une œuvre comme Empire, qui est composée de services en porcelaine fabriqués par Royal Copenhagen, je pense que cette vaisselle traditionnelle est essentiellement une contrefaçon de la porcelaine chinoise. Elle est en fait une imitation de la porcelaine chinoise, que l’industrie européenne a mis beaucoup de temps à reproduire. Lorsque ces assiettes s’insèrent dans les cages à oiseaux comme des porte-vaisselle, c’est un lien matériel fondamental qui dicte ce rapprochement. Les objets dialoguent d’un point de vue formel, mais ils convoquent aussi les questions de domestication et d’appropriation à travers ces différentes architectures humaines reproduites en miniature pour la captivité des oiseaux tropicaux. Mais votre remarque renvoie à une autre facette de mon travail. Dans l’œuvre European Interiors, j’utilise des biscuits pour chiens qui ont la forme d’os de dessin animé. Ces éléments démontrent un pouvoir particulier de projection et présentent une absurdité similaire à celle de la cage à oiseaux prenant la forme d’une architecture humaine. Quel chien se soucie que sa nourriture ressemble à un os de dessin animé ? Dans la sculpture, ces os de chien sont insérés dans des canapés en cuir. Ces biscuits sont en peau de porc. Ils disparaissent dans le cuir des canapés, ce n’est plus que de la peau animale. Je m’intéresse à ce redoublement de la représentation.

Il y a dans votre travail un intérêt persistant pour certains animaux et leurs représentations. Le chien est l’un d’entre eux. J’écoutais récemment le philosophe et historien des sciences Daniel Milo évoquer l’excès d’espèces de chiens inventées par l’homme. Cela a attiré mon attention alors que je pensais à notre conversation à venir.
La pièce intitulée China, constituées de grands vases et de chiens en porcelaine, fait écho à l’idée que vous évoquez. Une entreprise italienne fabrique chaque race de chien en porcelaine grandeur nature ; elle reproduit en quelque sorte le processus qui a précédé l’élevage, la domestication et l’invention de ces créatures par l’homme. Mon travail s’intéresse à toutes les préoccupations esthétiques qui sont impliquées dans cette production cumulative ; l’élevage de chiens est un cas particulièrement radical de sélection et de production de nouvelles espèces. Beaucoup de mes œuvres abordent les relations inter-espèces. Dans la performance avec le chien qui fait le mort, je m’intéresse aux ordres que les humains donnent aux chiens. Lorsque vous dressez un chien, vous pouvez lui demander de s’asseoir ou de se coucher ; et vous enseignez aussi à un chien de faire le mort. Pour moi, cela a à voir avec la connaissance de notre propre mortalité. En regardant les animaux, comme un chat couché au soleil, nous envions leur capacité à simplement être. En donnant au chien l’ordre de faire le mort, nous imposons à l’animal la conscience de notre propre finitude et l’obligeons à nous en rendre témoins.

Il y a d’autres motifs récurrents dans votre travail qui évoquent cet état incertain entre l’animé et l’inanimé. Je pense en particulier aux cheveux humains en tant que matériau que vous utilisez dans certaines de vos pièces, et à la perruque en tant qu’objet.
La perruque est un objet auquel je reviens sans cesse dans mon travail car elle parle toujours de l’économie mondiale actuelle. Les cheveux récoltés étaient autrefois cultivés par n’importe quel Européen pauvre, puis ce sont les populations d’Europe de l’Est qui les ont cultivés, et, à l’heure actuelle, la plupart des cheveux proviennent d’Inde et de Chine. Quel que soit leur origine, les cheveux sont décolorés, teints et permanentés afin d’être adaptés aux différentes coiffures prisées par les populations occidentales. Le processus mis en œuvre part du matériau et aboutit à une image. Mais bien sûr, le fait de travailler avec des cheveux en tant que matière première et en tant que produit cultivé, qui pousse à un rythme assez lent, témoigne de la proto-réalité du capitalisme. Ces cheveux nous renvoient à la question des limites, dans la mesure où nous ne pouvons les produire artificiellement ou les faire pousser plus vite. À travers la perruque, je suis également fascinée par le fait qu’elle fige l’image d’une coiffure pour toujours, c’est un moment presque photographique. La perruque est à la fois des cheveux et une image des cheveux. Je suis toujours attirée par les objets qui peuvent avoir cette double identité. La coco-fesses, graine du cocotier de mer, fonctionne pour moi de la même manière. Depuis que l’homme est arrivé sur les îles Seychelles, dont sont originaires ces cocotiers, ces graines sont devenues des objets de collection en raison de leur forme qui évoquerait les courbes d’un arrière-train féminin, comme une sculpture fabriquée par un arbre. Alors que la coco-fesses convoque l’image de la fertilité, ces graines sont aujourd’hui une espèce en danger.

Dans beaucoup de vos œuvres, vous utilisez des objets manufacturés et vous les modifiez très peu. Avez-vous établi certaines règles en ce qui concerne la manière dont vous intervenez sur ces objets ? Comment caractériseriez-vous vos gestes ?
Je ne dirais pas que j’ai des règles en tant que telles. Je pense que ce que je fais, c’est faciliter les conversations entre les différents matériaux et objets. Ces conversations peuvent être très simples, comme la coco-fesses qui ressemble à des fesses humaines et qui se retrouve sur le siège cassé d’une chaise de bistrot Thonet ou des matériaux tels que de l’ardoise qui sont déversés le long des toboggans en forme d’éléphant, reproduisant le mouvement que les enfants entreprennent à travers le tube digestif de l’animal. Dans les exemples cités, j’associe objets manufacturés et matériaux bruts.

Dans l’installation intitulée Kingdom, que vous avez présentée pour la première fois à la Biennale de Lyon en 2022, on reconnaît à peine les robes de bal qui sont utilisées pour contenir des matières premières provenant des industries du textile et du bâtiment.
Je continue à chercher des objets qui nous sont si familiers qu’ils deviennent presque invisibles, dans le sens où nous ne les remettons pas en question. Ces robes sont faites pour un certain nombre de rites de passage tels que les baptêmes, les confirmations et les mariages, elles ont la même forme et sont simplement agrandies au cours de la vie. Elles sont tellement standards qu’il faut être confronté à elles pour les voir. J’aime la simplicité de leur présentation. Ici, j’utilise l’un des principes de base de la sculpture, l’action d’élargir.

Au fur et à mesure que nous avançons dans cette conversation, je pense à la sculpture comme une manière de voir et de raconter, c’est à dire un travail critique, et à la façon dont vous partagez cette perspective sculpturale avec un public. Ces conversations que vous facilitez opèrent un changement de regard sur les objets et les matériaux.
Oui, comme nous l’avons évoqué précédemment, la plupart de mes sculptures sont des assemblages ; un objet dialogue avec un autre objet qui ouvre un nouvel angle de vue. Je collectionne ces objets, je passe du temps et je me familiarise avec eux jusqu’à ce que leur potentiel se révèle à moi. Et c’est la partie la plus enthousiasmante du processus : faire parler les objets de leur propre histoire, de leur bagage historique et culturel. C’est ce qui est à la fois excitant et un peu intimidant dans ce moment où je rassemble toutes mes œuvres dans un nouvel espace. Imaginez le bruit, la cacophonie.

L’exposition « Auto » de Nina Beier se déroule du 8 mars au 8 septembre 2024 au Capc, musée d’art contemporain de Bordeaux.

L’exposition « Parts » se tiendra du 22 mars au 8 septembre 2024 à Kiasma (Helsinki, Finlande). 


Vanessa Desclaux

Critique d'art et commissaire d’exposition