Sarah Schulman : « Pourquoi punir la personne qui nous pousse à nous regarder dans le miroir ? »
Romancière, dramaturge, productrice de cinéma lesbienne, juive et états-unienne, Sarah Schulman est aussi militante ; au sein d’Act Up dès la fin des années 1980, aujourd’hui avec Jewish Voices for Peace et BDS – toujours dans sa ville natale de New York. Ses essais critiques s’attachent à mettre en lumière une mécanique des rapports de pouvoir et les manières dont elle nous implique, de la gentrification, au sionisme, en remontant jusqu’à l’homophobie familiale, analysée par l’autrice dans Les liens qui empêchent. L’homophobie familiale et ses conséquences, un livre datant de 2009 dont la traduction vient de paraître aux Éditions B42. SB

La traduction des Liens qui empêchent arrive quinze ans après sa publication originale, en 2009. C’est votre troisième collaboration avec les éditions B42, les deux premières étant les traductions de livres publiés respectivement en 2013 [La Gentrification des esprits] et 2016 [Le Conflit n’est pas une agression]. Comment s’est opéré le choix de revenir à une parution plus ancienne ?
Ce livre a en réalité été écrit au 20e siècle, mais j’ai mis dix ans avant de parvenir à le faire publier. Les éditions B42 m’ont un jour contactée sans crier gare pour me dire qu’iels voulaient faire paraître La Gentrification des esprits. J’ai accepté, nous nous sommes rencontré·x·es et on s’est bien entendu·x·es. Je crois qu’iels ont constaté que leur audience répondait positivement à ce livre, et nous avons continué à travailler ensemble. Le choix de traduire Les liens qui empêchent est venu d’elleux. Personne n’avait jamais traduit ce livre. J’étais d’accord, sans être persuadée que ce texte serait pertinent. Et puis je suis arrivée ici, en France. Et j’ai été surprise de constater que ça l’était, incroyablement même. J’ai été à Paris, à Marseille, à Bruxelles et je me rends aujourd’hui à Lille pour un cinquième événement. À chaque fois, le public est intergénérationnel, avec notamment des jeunes femmes qui viennent me voir à la fin, lor