Sarah Friedland : « C’était une résidence artistique intergénérationnelle et un plateau de cinéma en même temps »
Venue du cinéma expérimental, la réalisatrice new-yorkaise Sarah Friedland arrive à la fiction avec un premier film qui nous invite à épouser le quotidien d’une octogénaire au moment où elle perd la mémoire et son autonomie. Tourné dans une maison de soin de luxe, À feu doux fait le portrait sensoriel d’une femme atteinte de la maladie d’Alzheimer avec une grande humanité, en dépouillant son sujet de l’atmosphère de drame qui colle habituellement à ses représentations au cinéma.

Avant sa sortie en France le 16 août, le film était présenté en avant-première au Fema, le festival de cinéma de La Rochelle. L’occasion de rencontrer la cinéaste, ancienne assistante personnelle de Kelly Reichardt et figure d’une jeune scène indépendante new-yorkaise qui produit un cinéma ambitieux formellement et débrouillard en termes de production. Sous son titre original, Familiar Touch a été présenté en septembre dernier à la Mostra de Venise en section Orizzonti où il a reçu le Prix du Premier film (Lion du futur), de la meilleure réalisation et le Prix de la Meilleure interprétation féminine pour Kathleen Chalfant. Depuis cette Première mondiale, le visage des États-Unis a changé pour le pire, mettant gravement en danger un système de santé déjà fragile et inéquitable. R.P.
Les films qui évoquent le grand âge ont habituellement tendance à parler de violence et de mauvais traitement. Bien au contraire, le ton d’À feu doux est très accueillant. Vous ménagez vos personnages, mais aussi votre public.
Ce qui a initié cette tonalité, c’est mon expérience en tant que soignante pendant plus de trois ans. J’ai remarqué à cette occasion que dans les situations de vieillissement et de perte de mémoire, c’était l’attitude des familles et non pas des personnes âgées elles-mêmes qui donnaient à la situation une dimension tragique. Les proches ont du mal à faire le deuil du parent qu’ils ont connu et qu’ils ne reconnaissent pas. Mes clients ne se percevaient pas comme les protagonistes d