« Ce qui est beau dans votre combat… »
La beauté des gens qui ont encore une espèce d’espoir et de dignité
quel que soit le milieu dont ils sortent.
John Cassavetes
Celui qui combat risque de perdre, celui qui ne combat pas a déjà perdu.
Bertolt Brecht
Je rencontre une première fois les salariés de GM&S (comme « Grand Moment de Solitude » me dira un tag sur la porte d’entrée) le 13 septembre 2017 (1). Deux semaines plus tôt l’usine d’emboutissage est devenue la propriété d’un certain monsieur Martineau, dont l’offre a été validée par le tribunal de commerce de Poitiers. Une semaine plus tard les lettres de licenciement parviennent aux 100 ouvriers que le repreneur ne garde pas puisque sur les 277 salariés 120 seulement conservent leur travail (en plus de la centaine que je viens de mentionner, 57 partent avec une corde au cou volontairement à l’insu de leur plein gré). Et le 28 septembre, je commence des entretiens individuels au long cours (2).
L’usine GM&S est installée à La Souterraine, en Creuse. Pour qui écoute les mots qu’il prononce, ces deux noms fouissent le même trou. Quand tu habites La Souterraine déjà, même avec un travail et une vie heureuse, il y a obligatoirement en toi quelques petites digues mentales dressées pour ne pas entendre ou voir ce que pointe le nom de la ville, cette vie de cave, de terrier, de rat-taupe, de clandestin. Et comme si ça ne suffisait pas, il faut encore situer cette ville en France, car elle n’est pas connue : « La Souterraine, en Creuse ». Ça creuse, ça enfouit, ça sent le tunnel, la tombe, la cave encore.
On a touché le fond mais on creuse encore.
Les salariés de la GM&S n’ont peut-être pas eu si souvent l’occasion de dire qu’ils travaillaient à La Souterraine, en Creuse, du temps qu’ils y travaillaient dans l’indifférence — en quelque sorte — du reste du pays, parce qu’ils travaillaient, parce que l’usine prospérait. Mais depuis un an qu’ils se battent pour préserver l’emploi ou obtenir des indemnités de licenciement significatives, ou plutôt depuis qu’ils