Poésie

Occupy masculinité et autres problèmes déposés

artiste et écrivain

Une vie faite de messages, discours, injonctions, références et novlangue, qu’on entend, lit, visualise, répète, ressent et intériorise, tel est le bain saturé de notre quotidien et Jean-Charles Massera, comme dans son précédent opus Le monde comme il débloque, montre et démystifie combien nous en sommes traversés. La forme fragmentaire de son livre actuellement en cours de finalisation (et qui sera publié au printemps) en est la meilleure preuve. Nous en donnons ici quelques extraits inédits.

LE RÉVEIL DU RÉEL

(L’Aube de la sidération)

 

 

Les derniers         penchaient pour le

 

c’est finalement

 

le

 

qui l’emporte

 

selon les résultats définitifs

 

Le

 

s’est rapidement confirmé

 

dans la nuit après dépouillement

 

dans 300 des 382

 

Les derniers         penchaient pourtant plutôt vers un

 

Un ultime

avait donné le

 

contre

 

Les         ont pris une décision claire

 

sur la base d’énoncés fallacieux

 

Reformuler fallacieux plusieurs fois

(Qui est destiné, qui cherche à tromper, à induire en erreur)

Sentir (enfin, mais bon… )

un malaise, un dépit

(« profond » inutile, ne dit rien d’autre

           que « profond » – une image, pas une sensation)

 

que l’on sait sans retour possible.

 

(L’intelligence du réel a fait défaut au référendum (voix – réduites à leur seule dimension électorale – galvanisées au mépris de la raison, des faits, des actes et des conséquences). Mauvaise foi déformant un réel instrumentalisé.)

 

 

Je sens (enfin) le sans retour possible.

                           Sans retour possible.

 

Ce qui touche dans ce moment-là

c’est qu’il y aura de la permanence

(et ensuite, sans fin)

qu’il n’y aura

pas de retour possible.

 

Se conscientise ce fait désormais établi

– alors qu’il était juste possible, et surtout plutôt improbable.

 

Cette conscientisation fait densité

S’installe la densité.

 

 

 

 

POURTANT

 

Pourtant on le sait

À chaque fois

Et c’est toujours

Et en même temps on a beau

 

on refait

 

Et ça quel(le) que soit

Alors oui c’était un peu différent

déjà parce que

et puis y avait pas

 

mais au final

 

 

 

MÉMOIRE VIVE

  

Non mais là c’est encore pire parce que

Parce que là ça veut dire que

 

Donc en fait, quand il y a eu         c’était

pas du tout…

 

Ce qui veut dire que quand         en fait…

 

Et si ça c’est resté aussi longtemps

 

tu peux imaginer que…

 

Et ça c’est uniquement

Donc en fait…

 

Mais en fait y a plus du tout de

Ça n’existe plus du tout

 

Ah bah là [par exemple] je sais pas comment on ferait

mais surtout je sais p


[1] Ce texte a paru dans Télérama n° 3129, « 10 nouvelles… Pour 2010 ».

Jean-Charles Massera

artiste et écrivain

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Notes

[1] Ce texte a paru dans Télérama n° 3129, « 10 nouvelles… Pour 2010 ».