Absolutely nothing
Un
30 septembre 2013
La nuit, avant mon départ pour Milan, je rêve que je suis cambriolé, je veux déclarer le vol mais je n’ai aucune idée de ce qui m’a été dérobé, je sais qu’il me manque quelque chose, je suis incapable de dire quoi, porter plainte est impossible.
Le rêve me revient à l’esprit le lendemain matin alors que je charrie ma valise depuis la station Pyramide jusqu’à la gare de Roma Ostiense. Durant tout le voyage en train j’essaie de me souvenir, je ne me souviens pas, j’insiste, je ne me souviens pas. J’arrive à la gare de Milano Centrale en proie à un fourmillement de pensées, la sensation d’un minuscule espace vide que je ne parviens pas à combler à l’intérieur de mon crâne. En fin d’après-midi, je rencontre Silva, photographe et éditrice ; c’est elle qui prendra en charge notre voyage aux États-Unis. On a rendez-vous près de la piazza Gae Aulenti, on s’assoit dans un bar, on commande deux verres d’eau minérale, on nous les sert avec la rondelle de citron logée sur le bord.
Silva m’explique notre itinéraire et tire de son sac un classeur à anneaux, elle l’ouvre, le feuillette, chaque pochette transparente contient des documents, des autorisations, des listes de contacts, des cartes à grande échelle ou bien détaillées, des photos aériennes des lieux où nous nous rendrons. Du matériel dont j’ai déjà plus ou moins connaissance parce qu’il m’a été envoyé par mail au cours des dernières semaines : je l’ai regardé vite fait, j’ai songé à l’imprimer et puis j’ai oublié.
Tout en continuant à parler du voyage, Silva déplie une grande carte des États-Unis et l’étend sur la table. Je regarde les États colorés, les frontières géométriques, et puis je regarde dehors, à travers la baie vitrée du bar, les buildings et les grues en arrière-plan tandis que Silva colle le bout de son index droit sur la Californie et que, procédant par étapes, elle le fait descendre en direction du golfe du Mexique, et moi je suis ce doigt, de nouveau les buildings, le doigt, le bruis