Essai

Into the sky

Écrivain

À propos d’Eventide de Sharon Lockhart (2022) et de La Fuite en Égypte d’Adam Elsheimer (1609), tel est le sous-titre du magnifique essai de Jean-Christophe Bailly. L’« histoire des hommes sous l’immensité du ciel » rapproche le film et le tableau sous le signe de la « lenteur souveraine » du premier, un plan fixe de 35′ où l’on voit arriver la nuit, s’allumer et filer les étoiles, apparaître des silhouettes entourées de halos. La rencontre des deux œuvres invite à déployer une chaîne d’associations en emportant d’autres avec elle, comme La Nuit du chasseur de Charles Laughton.

Lorsque j’ai appris que dans le programme du festival Cinéma du réel organisé dernièrement à Beaubourg figurerait un film de Sharon Lockhart, j’ai aussitôt décidé d’assister à la séance au cours de laquelle il serait projeté. Je ne savais pas ce que j’allais voir et n’avais connaissance que du titre du film, Eventide, et de sa durée, 35’, mais ayant déjà vu plusieurs films de Sharon Lockhart, notamment à Marseille où elle avait été en 2019 l’invitée d’honneur du festival du film documentaire (FID), j’étais impatient de voir ce que cette fois-ci elle aurait réalisé. C’est la vision de son film Lunch Break, non pas vraiment projeté mais plutôt montré en continu lors d’une exposition au Bal qui avait éveillé une première fois mon attention sur son travail : en effet, ce film, tout entier construit à partir d’un unique travelling réalisé dans l’allée centrale d’une usine à l’heure de la pause déjeuner avait la particularité de se dérouler selon un extraordinaire ralenti et produisait un effet d’élongation et de vertige horizontal sidérant. La vitesse de déroulement de ce travelling qui avançait huit fois plus lentement qu’en temps réel remettait justement en question la réalité de notre perception du temps, et de même qu’il y a dans la chant de certains oiseaux comme la mésange charbonnière ou le troglodyte mignon, lorsqu’on les écoute au ralenti, une quantité d’événements sonores supérieure à celle que nous percevons, la charge de sens de l’image-mouvement augmente lorsque celle-ci défile au ralenti. J’avais pu ensuite – et c’est la raison pour laquelle j’étais allé à Marseille – contacter Sharon Lockhart, mon but étant de l’inviter à participer avec son film à une séance d’un séminaire que je tentais de construire au Jeu de Paume et qui, intitulé Voir le temps venir, eut effectivement lieu fin 2019, juste avant le déclenchement de la pandémie et alors que Paris était en partie paralysé par une grève des transports causée (déjà !) par un projet de réforme des retraites


[1] Des fichiers facilement accessibles en existent sur le net.

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Notes

[1] Des fichiers facilement accessibles en existent sur le net.