Un « pognon de dingue » pour ces salauds d’assistés ?
Nombreuses sont les voix qui se sont élevées contre la saillie présidentielle sur « le pognon dingue » que coûterait la protection sociale. Elle n’est pas seulement une attaque indécente mais constitue la remise en cause de la philosophie politique de l’Etat social qui a fait l’objet d’un compromis à la Libération et auquel une large majorité de Français continuent d’adhérer. Ces propos relèvent en effet d’une entreprise de délégitimation politique de la protection dans une société démocratique. Le système de protection sociale n’est plus perçu comme devant participer à l’institution d’un « ordre social nouveau » [1] plus juste et plus solidaire, mais comme un simple organisme comptable remboursant des frais médicaux, payant des retraites, allouant différentes allocations… Dès lors ainsi conçu, il s’apprécie prioritairement selon la logique économique et les contraintes du souverain marché.
Non seulement de tels propos alimentent un individualisme agressif déniant toute forme de solidarité mais ils interdisent une mise à plat de notre problème majeur : comment penser un État social adéquat à une société en tous points très différente de celle de 1945 ? Comment affronter ce problème dans une société tiraillée entre les exigences de sa cohésion interne et son ouverture à un monde global fortement inégalitaire ?
Cette diatribe, loin d’ouvrir la voie à une réflexion sur cette tension, inscrit tout simplement la question de la protection et de la solidarité dans une logique économiciste qui fait de la production et de l’efficacité l’alpha et l’oméga de toute intervention politique dans une société assimilée à une entreprise.
Ces paroles sont revendiquées au nom de cette société-entreprise à laquelle participent ceux qui travaillent et que mettent en danger tous les autres.
Certes de telles attaques ne sont pas nouvelles, elles s’inscrivent dans une dynamique bien antérieure – souvenons-nous de « l’assistanat cancer de la société » du ministre Wauquiez – mais e