Santé

Isolement et contention en psychiatrie : une occasion ratée de donner une voix aux patients

Sociologue

En psychiatrie, contention et isolement sont le fruit de décisions motivées au titre du soin, mais elles constituent aussi une variable d’ajustement pour une organisation peinant à prendre soin des personnes hospitalisées. L’occasion a été donnée à deux reprises récemment de compenser cela, et de répondre aux attentes d’une psychiatrie plus humaine qui placerait les personnes vivant avec des troubles psychiques au cœur du processus de décision. Mais ni le Conseil Constitutionnel en juin, ni l’Assemblée Nationale aujourd’hui ne s’en sont saisis. Ces patients restent donc sans voix.

À la suite d’une « question prioritaire de constitutionnalité » (QPC) portant sur l’usage de la contrainte en psychiatrie, le projet de loi de finance de la sécurité sociale (PLFSS) arrivé en lecture définitive lundi 30 novembre à l’Assemblée Nationale comprend un article dédié à l’encadrement de la contention et de l’isolement en psychiatrie. L’article 42 du PLFSS est un cavalier législatif qui vient bien renforcer le contrôle des juges sur ces actes de privation de liberté, mais dénie toute participation des usagers de la psychiatrie. Il a par ailleurs été voté sans débat.

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L’espoir soulevé par la QPC d’une psychiatrie qui placerait les personnes vivant avec des troubles psychiques au cœur du processus de décision a ainsi été déçu, et la communauté psychiatrique exclue des échanges milite aujourd’hui pour l’ouverture d’un débat d’ampleur sur la question des droits et des libertés des usages de la psychiatrie française. Isolement et contention en psychiatrie font l’objet de prescriptions médicales et sont encadrés par le droit. Ces mesures de privation de liberté augmentent depuis 2011, alors qu’elles sont extrêmement traumatiques pour les personnes qui les vivent, comme nous avons pu le constater au cours d’une recherche de grande ampleur menée depuis 2019.

Cette situation alerte et appelle une réflexion sur les alternatives à l’isolement et à la contention en psychiatrie, sur la manière de les encadrer juridiquement et de faire entendre la voix des personnes faisant l’expérience des troubles psychiques et de leur traitement. L’occasion aurait pu en être donnée par la question prioritaire de constitutionnalité portant sur les mesures d’isolement et de contention en psychiatrie à laquelle le Conseil Constitutionnel a répondu le 19 juin . Mais le débat est resté confiné et la réforme de l’encadrement légal de ces mesures en psychiatrie est en deçà des attentes des personnes.

La contrainte en psychiatrie, un traumatisme pour les personnes

Durant les temps d


[1] Les prénoms ont été modifiés de manière à respecter l’anonymat des participants. Tous ont signé un consentement éclairé pour leur participation.

Frédéric Mougeot

Sociologue

Rayonnages

SociétéSanté

Mots-clés

Psychiatrie

Notes

[1] Les prénoms ont été modifiés de manière à respecter l’anonymat des participants. Tous ont signé un consentement éclairé pour leur participation.