Aux bons soins d’une architecture déconfinée
L’expérience de la pandémie a fait évoluer la suspicion de contamination des humains par agents pathogènes aérauliques, tant au gré des recherches et tâtonnements scientifiques que sous l’effet de paranoïas et fantasmes. D’une maladie du contact, qu’elle demeure semble-t-il pour partie, la qualification de la Covid apparaît s’être surtout déplacée vers une pathologie du respiratoire – véhiculée par les canaux oral et surtout nasal, et occasionnant souvent des troubles pulmonaires.
Ainsi n’aurons-nous peut-être jamais été à cette occasion aussi conscients de la charge pathogène véhiculée par l’air ambiant, que nous avons en partage et produisons ensemble. Brassant et inhalant cette commune atmosphère, nous n’avons de cesse aujourd’hui de nous figurer tels des essaims de gouttelettes émanant de nos expectorations salivaires, qui diffusent autour des potentiels malades que nous sommes. Par le nez nous ingérons le liquide morbide. Par la bouche nous le diffusons.
Au pic de la première vague, croisant au large de l’archipel nippon et de la côte californienne, deux navires auront au printemps dernier semé l’effroi. Leurs malheureux passagers y virent la villégiature qu’ils s’étaient offerte se transformer en enfer, une totale réclusion leur valant sans échappatoire possible – par le truchement des réseaux de conditionnement d’air – de faire l’objet les uns après les autres d’une implacable contamination. Il y avait là quelque chose d’une contemporaine léproserie, dont le facteur d’accélération tenait moins à la promiscuité physique et au risque – conjurable – du contact de visu qu’à la « connexité systémique » (par le système qui en est le vecteur) et la menace – imparable – de la contamination sine visu.
La fameuse hétérotopie foucaldienne du paquebot aura dans ce cas fonctionné à double sens : soit le bateau comme miroir, enclos, à l’envers du monde, et ce monde, ouvert, redevenu désirable à l’inverse du navire.
Dans une mesure analogue, dans nos pratiques pl