Prospective écologique et urbaine depuis Marseille
Pendant quelques jours, et avant que les lumières ne s’éteignent tout aussi brutalement qu’elles s’étaient allumées, Marseille aura donc été au centre de l’attention nationale, avec une actualité multiple : le sommet de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), un plan national de redressement de la ville, des crimes récents de petits trafiquants de drogue, le lancement de la campagne des élections présidentielles – et le meurtre d’un jeune homme de 19 ans par un policier le 4 août dernier.
Vu depuis Marseille, le boucan médiatique est sidérant, tant par son volume que par sa confusion thématique. La ville est « en retard », et l’État vient la sauver. L’intrusion gouvernementale, avec son mélange classique d’autoritarisme et de paternalisme, vient écrire un nouveau chapitre dans le pas de deux qui se joue depuis des siècles entre l’État-nation et cette vieille ville « ingouvernable » qu’il adore mater pour prouver sa souveraineté.

Le porte-parole de l’Élysée invite ainsi à « pilonner et continuer à pilonner les trafiquants et les dealers »[1] – il s’agit souvent de jeunes gens, voire de mineurs, démunis, originaires des anciennes colonies françaises. Exprimant avec une franchise bienvenue l’inconscient colonial de la République française, un ancien premier ministre socialiste a quant à lui proposé jeudi dernier de « tout raser à Marseille, tout reconstruire, repeupler ces quartiers[2] » – des propos qui ont été repris le soir même sans désaveu par le Président.
Aucune réponse n’a pourtant été apportée à l’importante question posée par Issam el Khalfaoui : « [Monsieur le Président], je voudrais comprendre comment un équipage de trois policiers a pu laisser mon fils agonisant plusieurs longues minutes sans prodiguer les premiers secours. Aurait-on officieusement rétabli la peine de mort sur la place publique[3] ? »
Pour chercher un peu d’air loin de cette actualité suffocante, nous ouvrons ici le temps long de la prospective – ce qui p