Le financier, le musulman et le péril des signifiants flottants
Lors de son discours à l’Université d’été de La France Insoumise (LFI), tenu à Valence le 29 août dernier, Jean-Luc Mélenchon (JLM) a prononcé ces mots : « Il faut unir la société par la laïcité et le refus absolu de la diabolisation d’une religion, quelle qu’elle soit. Non, l’ennemi ce n’est pas le musulman, c’est le financier ! ». Cette dernière formule, en particulier, a alimenté une vive controverse sur les réseaux sociaux.
Pour l’honnêteté de mon propos, précisons la nature de mes liens avec LFI. Après avoir soutenu ouvertement la candidature de JLM à l’élection présidentielle de 2017, j’ai interrompu rapidement mes (modestes) activités militantes en raison – notamment – de l’indécrottable césarisme de cette organisation politique. Je n’ai pas changé d’avis entre temps et me suis toujours tenu à distance, même si l’évolution récente de LFI sur l’antiracisme et la « créolisation » m’ont paru être des signes positifs dans un espace public laminé par les offensives idéologiques d’extrême droite.

En prenant connaissance de la formule controversée, je n’ai pas raffolé de sa tournure ni du choix des termes : la rhétorique de l’ennemi me semblait excessivement militaire ; la focalisation sur le « financier », impropre à mettre en cause le capitalisme dans son ensemble (et pas seulement la bourse) ; la focalisation sur le musulman, compréhensible, mais au détriment des autres minorités éventuellement ciblées. Sur le moment toutefois, je n’y ai pas entendu de connotation antisémite. Et j’avoue ma surprise quand, dès le lendemain, de nombreux contacts twittos (juifs et non juifs) ont vivement déploré cette formule, y voyant au pire une marque d’antisémitisme, au mieux une coupable maladresse.
Je suis extrêmement sensible à la question de l’antisémitisme et du racisme en général, en partie en raison d’ascendances juives. Cette judéité ne me confère aucune supériorité de point de vue, bien sûr, elle a simplement redoublé mon étonnement devant la controverse, et i