L’impasse Macron

À moins de six mois de l’élection présidentielle, le moment est venu de dresser un premier bilan de la présidence d’Emmanuel Macron. Vu d’aujourd’hui, il semble le mieux placé pour prendre sa propre succession. Pourtant, non seulement il s’est montré incapable de corriger les difficultés structurelles que rencontre le pays, mais il les a plutôt aggravées en exacerbant les défauts des institutions de la cinquième République et en accentuant les tensions sociales et territoriales qui divisent le pays. L’ampleur sans précédent qu’a pris l’abstention aux élections intermédiaires et la défiance exceptionnelle manifestée en France à l’égard de la vaccination illustrent la gravité particulière de cette crise démocratique.
Il l’avait exprimé dès 2015 : Emmanuel Macron est convaincu que la France est au fond restée monarchiste. Il croit que les Français sont à la recherche d’un « Sauveur suprême », rôle qu’il pense bien entendu être en mesure d’incarner. Et c’est sans doute ce qui explique son mépris à l’égard d’un François Hollande qui lui avait pourtant mis le pied à l’étrier : pour Emmanuel Macron, envisager que le Président puisse être considéré comme « normal » relève du crime de lèse-majesté. Du coup, il a au contraire depuis 2017 poussé à l’extrême la dimension « jupitérienne » de la fonction présidentielle.
Un appareil d’État en dehors et au-dessus de la société
Facteur aggravant, Emmanuel Macron est aussi et avant tout un énarque et un inspecteur des finances, le gratin de la haute fonction publique. Or cette aristocratie d’État endogamique est et a toujours été porteuse d’une vision autoritaire, hiérarchique et descendante de l’action publique. La France a été, avec le Royaume-Uni, un des pays pionniers de la construction des États-Nations modernes, grâce à un appareil d’État puissant. Celui-ci n’a jamais été conçu cependant comme devant se mettre au service de la société mais au contraire comme devant se situer à l’extérieur et au-dessus de celle-ci pour