écologie

S’orienter écologiquement par temps de guerre et de choc pétro-gazier

Économiste, Activiste

Les pays européens ont déboursé plus de 20 milliards d’euros en hydrocarbures à la Russie depuis le début de son invasion de l’Ukraine le 24 février. Financer l’effort de guerre russe, entretenir notre dépendance périlleuse aux énergies fossiles : ce laisser-aller est indéfendable. Voici dix lignes directrices pour sevrer l’économie européenne, en évitant les embûches.

Les crises les plus graves, a fortiori quand les dirigeant.e.s ne les ont pas anticipées, sont celles qui provoquent des aggiornamento idéologiques inédits, dans les discours sinon dans les actes. En réaction à la pandémie de Covid-19, les thuriféraires de la libéralisation des marchés ont ainsi soutenu des formes de relocalisation et d’autonomie en matière économique. Ces jours-ci, l’invasion de l’Ukraine par la Russie de Vladimir Poutine pousse nos dirigeant.e.s et responsables politiques à soutenir l’idée de « sobriété énergétique » – y compris celles et ceux qui jusqu’alors n’ont fait que renforcer notre dépendance aux énergies fossiles.

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Les lignes bougent, mais de manière confuse. Clarifier les choses est de ce fait essentiel : de quoi parle-t-on ? Quelles sont les conditions d’une politique de sobriété énergétique efficace, adaptée et juste ? Alors que le gouvernement vient d’annoncer un « plan de résilience » peu convaincant, voici dix hypothèses, nécessairement provisoires, sur les immenses défis énergétiques auxquels nous faisons face. Dix hypothèses, soit autant de lignes directrices, pour nous orienter dans des discussions difficiles, telles que celles d’un possible embargo européen sur les importations d’hydrocarbures russes.

Thèse n°1 : rien ne justifie de contribuer à l’effort de guerre russe

Rien, absolument rien, ne peut justifier de contribuer à financer l’effort de guerre de la Russie de Vladimir Poutine en Ukraine. C’est pourtant ce que nous faisons. Chaque jour qui passe, en raison de notre dépendance au charbon, au gaz et au pétrole russe, nous contribuons à financer la guerre de Poutine. Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les pays de l’Union européenne (UE) ont déboursé 20,2 milliards d’euros à la Russie pour se fournir en énergies fossiles : 12,6 milliards d’euros de gaz, 7 milliards d’euros de pétrole, 0,5 milliards d’euros de charbon, soit entre 650 et 700 millions d’euros par jour[1].

Sur une année normale,


[1]D’après le décompte en temps réel réalisé par le Centre for Research on Energy and Clean Air, à jour du 27 mars 2022.

[2]Note du T-lab et de l’Aitec (Association internationale de techniciens, experts et chercheurs) du 3 mars 2022 : « Quels sont les intérêts de TotalEnergies en Russie ? ».

[3]Communiqué de presse de TotalEnergies du 24 mai 2018 : « Russie : TotalEnergies étend son partenariat avec Novatek au travers du projet Arctic LNG 2 ».

[4]Le volume de gaz naturel importé dans l’Union européenne (UE-27) en provenance de Russie a augmenté de 124,3 milliards de mètres cubes en 2015 à 152,6 milliards de mètres cubes en 2020, selon la plateforme Statista.

[5]Rapport de l’Agence internationale de l’énergie, Net Zero by 2050, mai 2021.

[6]Observatoire de la Commission de régulation de l’énergie, Les marchés de détail de l’électricité et du gaz naturel, 3ème trimestre 2021, 30 septembre 2021.

[7]Jim Pickard, George Parker, Nathalie Thomas, « Boris Johnson opens door to fracking in response to Ukraine war », Financial Times, 9 mars 2022.

[8]Matthew Choi, « The Biden-oil sector’s awkward embrace », Politico, 3 novembre 2022.

[9]Collectif, « Le gouvernement va t-il autoriser l’exploitation d’hydrocarbures en Lorraine ? », Basta!, 19 janvier 2021.

[10]Fabrice Dubault, « Guerre en Ukraine : le projet de gazoduc MidCat entre Occitanie et Catalogne refait surface », France 3 Occitanie, 12 mars 2022.

[11]Les projets selon la Commission européenne sont accessibles ici ; le communiqué de presse de Friends of the Earth Europe et Food & Water Action Europe est accessible .

Maxime Combes

Économiste, Membre d'Attac

Nicolas Haeringer

Activiste, Chargé de campagne chez 350.org

Notes

[1]D’après le décompte en temps réel réalisé par le Centre for Research on Energy and Clean Air, à jour du 27 mars 2022.

[2]Note du T-lab et de l’Aitec (Association internationale de techniciens, experts et chercheurs) du 3 mars 2022 : « Quels sont les intérêts de TotalEnergies en Russie ? ».

[3]Communiqué de presse de TotalEnergies du 24 mai 2018 : « Russie : TotalEnergies étend son partenariat avec Novatek au travers du projet Arctic LNG 2 ».

[4]Le volume de gaz naturel importé dans l’Union européenne (UE-27) en provenance de Russie a augmenté de 124,3 milliards de mètres cubes en 2015 à 152,6 milliards de mètres cubes en 2020, selon la plateforme Statista.

[5]Rapport de l’Agence internationale de l’énergie, Net Zero by 2050, mai 2021.

[6]Observatoire de la Commission de régulation de l’énergie, Les marchés de détail de l’électricité et du gaz naturel, 3ème trimestre 2021, 30 septembre 2021.

[7]Jim Pickard, George Parker, Nathalie Thomas, « Boris Johnson opens door to fracking in response to Ukraine war », Financial Times, 9 mars 2022.

[8]Matthew Choi, « The Biden-oil sector’s awkward embrace », Politico, 3 novembre 2022.

[9]Collectif, « Le gouvernement va t-il autoriser l’exploitation d’hydrocarbures en Lorraine ? », Basta!, 19 janvier 2021.

[10]Fabrice Dubault, « Guerre en Ukraine : le projet de gazoduc MidCat entre Occitanie et Catalogne refait surface », France 3 Occitanie, 12 mars 2022.

[11]Les projets selon la Commission européenne sont accessibles ici ; le communiqué de presse de Friends of the Earth Europe et Food & Water Action Europe est accessible .