Street workout : la fabrique du muscle dans l’espace public
Dans les villes françaises, on observe depuis une dizaine d’années la croissance d’espaces urbains dédiés à la pratique extérieure d’exercices de musculation. Barres de traction, supports de dips (exercice consistant à entraîner les pectoraux et les triceps), chaises à abdominaux, machines pour le rowing (exercice consistant à tirer un poids en direction de ses abdominaux pour travailler les muscles du dos) : autant d’exemples qui confirment le fleurissement de ces nouveaux équipements dans l’espace public.
Ces activités de musculation en extérieur sont en fait l’héritage de pratiques anciennes. En Californie, des lieux spécialement dédiés à la pratique du culturisme en extérieur voient le jour très tôt. À Santa Monica par exemple, Muscle Beach est créée dès 1934, une plage où l’on trouve, comme son nom l’indique, une plateforme de soulevé de poids. Des figures comme Joe Gold – le créateur de la fameuse chaîne de salles de sport Gold’s Gym – s’y entraînent notamment. Par la suite, d’autres plages du même type voient le jour, comme à Venice, toujours en Californie. Dans ce lieu configuré pour et par les pratiques sportives extérieures de toutes sortes, l’entraînement aux poids y a toute sa place.
Des figures célèbres du bodybuilding comme Arnold Schwarzenegger (sept fois sacré Mister Olympia entre 1970 et 1980, titre suprême de la discipline), s’y entraînent à partir des années 1970, participant à la dimension mythique de ce lieu. Cependant, ces activités de soulevés de poids en extérieur sont pour la plupart une réplique de celles réalisées en intérieur dans les salles de sport : l’activité reste circonscrite à un endroit précis et se veut statique. Ce sont des plateformes de fitness outdoor en quelque sorte. Or, ces caractéristiques sont questionnées par la pratique du street workout, apparue pour certains en Russie dès les années 1980, mais surtout rendue visible entre le milieu des années 1990 et le début des années 2000 dans les parcs publics de quartiers populaires de New York puis diffusée mondialement grâce à internet et aux réseaux sociaux. Un des héros mythiques de ce sport, Hannibal, dont l’histoire est détaillée plus loin, a joué un rôle fondamental dans ce processus de globalisation.
Comme son nom l’indique, cette pratique consiste à réaliser des entraînements de musculation dans la rue, en faisant « corps » avec les caractéristiques de l’environnement urbain. Les pratiquant·es utilisent les éléments matériels à leur disposition (échafaudages, échelle extérieure d’immeuble, murs, mobilier urbain, bidons abandonnés, matériel de chantier, etc.) détournés de leur usage originel, pour réaliser des mouvements du corps et in fine, développer leurs muscles, leur endurance et leur résistance. Les deux grandes différences du street workout avec les plateformes extérieures dédiées au soulevé de poids sont notables : le mouvement et la contingence. Le street workout vise à la réalisation d’exercice polyarticulaires – tous les muscles sont en action en même temps – et à changer de lieux : on passe d’un endroit à l’autre de la ville. La contingence renvoie à l’idée que l’on s’adapte à ce que l’on trouve dans le cadre urbain. Les pratiquant·es partent ainsi de l’existant pour envisager un plan d’entraînement, et non l’inverse.
Empowerment par encorporation du cadre urbain
Le street workout s’est construit à la fois en référence et en réaction à la pratique du bodybuilding, très populaire aux États-Unis dans les décennies ayant suivi la Seconde Guerre mondiale (des années 1970 aux années 1990 particulièrement). Le bodybuilding perd par la suite de sa superbe, souvent associé à des dérives de diverses natures. Le dopage surtout, mais également le coût de la pratique : inscription à la salle, consommation de nutriments et de suppléments rendent sa pratique conditionnée. Sur le plan de l’entraînement pur, le bodybuilding est aussi été critiqué pour son aspect « sclérosé » : le muscle est mis en avant pour sa forme plus que sa fonction, on valorise l’hypertrophie musculaire à l’extrême, quant au travail musculaire, il est routinier et se pratique en solitaire dans une salle fermée.
Le street workout émerge alors dans ce contexte et son apparition dans les quartiers populaires ne doit rien au hasard. Il s’agit pour les habitants de ces quartiers de développer musculairement leur corps en transformant les contraintes et difficultés de l’environnement urbain – physiques, mais aussi sociales et économiques – en une force : en utilisant celui-ci pour se muscler, l’individu vise un certain empowerment par le corps.
Concrètement, l’entraînement du corps consiste alors à développer les muscles et le cardio par l’utilisation directe de l’environnement urbain. C’est ce dernier qui sert de fabrique du muscle, soit un espace permettant de développer physiquement un·e athlète « complet·e ». Les éléments urbains extérieurs – cette écologie urbaine – qui semblaient contraindre, enfermer dans une relégation et une exploitation économique et sociale, sont au contraire le cœur d’une appropriation qui se veut émancipatrice. Ainsi, tous les éléments de cet environnement sont potentiellement utilisables et utiles à la réalisation du projet de développement corporel : non seulement ils constituent une solution concrète pour se sentir mieux adapté·e au milieu (avoir un corps physiquement prêt à se battre, résister, courir vite, être respecté), mais ils offrent aussi la possibilité de se construire un nouveau mode de vie, un sens de l’existence différent.
C’est dans ce cadre que la ville apparaît comme un espace de liberté, accessible gratuitement, diverse dans ses caractéristiques et donc dans le champ des possibles. Non seulement le cadre urbain n’est plus rejeté, mais devient un élément de fierté qui caractérise un quartier, un mode de vie, une culture propre. C’est pourquoi le street workout reliait initialement des techniques d’entraînement à l’écoute de musiques, rap et hip-hop essentiellement. Cette musique motive, pousse à aller plus loin tout comme elle sert à montrer « qui l’on est » et « d’où l’on vient ». En somme, le corps, qui est à la fois l’outil et le but de la pratique du street workout, fusionne avec l’environnement urbain, au sein d’un processus d’ « encorporation ».
L’histoire de Hannibal, en est emblématique. Originaire du Queens, quartier populaire de New York, il est confronté à la pauvreté et au trafic de drogue au cours de sa jeunesse. C’est par l’exercice physique, en utilisant l’environnement urbain – et des techniques notamment inspirées de la vie en prison –, qu’il se construit une autre vie en se dotant d’un autre corps[1]. Grâce au street workout, Hannibal connaît la réussite économique avec la création d’une marque de vêtements associée à ce sport, il possède aussi de nombreux contrats publicitaires et propose des programmes d’entraînement (notamment le programme Around The World).
Une telle évolution a été rendue visible très tôt via la publication de vidéos : « Ces premières vidéos, mises en ligne sur YouTube quelques années après que le portail naisse en 2005, ont immédiatement rencontré un énorme succès et suscité un intérêt mondial. La vidéo la plus fréquemment citée par les pratiquant-e-s comme étant le déclencheur de leur propre pratique et du succès mondial du “mouvement” est une vidéo postée sur YouTube en 2008, intitulée “Hannibal for King”. Elle donne à voir les prouesses d’Hannibal, un athlète afro-américain s’entraînant dans un parc urbain en performant des enchaînements de mouvements de musculation au poids du corps qui allaient devenir les exercices de base de la future discipline.»
La success story d’Hannibal montre que cet empowerment par encorporation ne se veut pas seulement solitaire, mais est au contraire collectif. Le street workout est en effet souvent pratiqué en groupes, basés sur une solidarité de type mécanique à la Durkheim, caractéristique des petits groupes d’individus marqués par une forte conscience collective du fait de la similarité des liens qui les unissent. Dans le cas du street workout, les personnes s’assemblent dans ce que l’on appelle des teams, des équipes. Par exemple, la team de Street Workout américain « BARTENDAZ » de New York, fondé par Hassan Yasin, plus connu sous le pseudonyme de « GIANT » (Growing Is A Noble Thing), utilise le slogan « Health is Wealth » (« la santé est une richesse »), une dimension sanitaire à relier à la lutte contre la ségrégation. Plus largement, c’est par l’intermédiaire des teams que ce sport essaime petit à petit d’abord aux États-Unis puis dans le reste du monde.
Cette tendance concerne certes les pratiquants masculins qui, dans la possibilité de développer les muscles visibles associés à la masculinité, ont considéré le street workout très attractif. Selon l’anthropologue Alain Mueller, le street workout était à ses débuts essentiellement pratiqué par des hommes, plutôt jeunes (18-30 ans). Le ratio de la répartition pratiquantes/pratiquants était de 1 pour 10. La difficulté des exercices – comme de réaliser le maximum de muscle-up[3], a induit pendant longtemps des préjugés genrés selon lesquels les hommes seraient plus à même que les femmes de les réaliser, ce qui a pu freiner l’arrivée plus nombreuse de pratiquantes.
Lorsque la pratique s’est peu à peu féminisée – de façon significative à partir du début des années 2010 –, beaucoup n’ont pas hésité à valoriser une pratique différente, dite « pour femmes », pour faire en sorte qu’elles se retrouvent entre elles. Toutefois, par la philosophie qu’il prône (la santé par le sport, l’activité physique dans le cadre urbain), les adeptes du street workout ont cherché de plus en plus à sortir des stéréotypes de genre et à encourager une diffusion plus large de la pratique, quasi « a-genrée ».
La diffusion de vidéos via internet a été également particulièrement importante pour le développement de la pratique chez les femmes. La circulation de programmes d’entraînement spécifiques de même que la mise en scène de certaines « héroïnes » de la pratique à une échelle mondiale ont favorisé les phénomènes d’identification et d’imitation comme la vidéo « First Female at Muscle-Up Competition ! Earth – Bartendaz » postée sur YouTube en 2013, et considérée comme la première compétition féminine de muscle-up[4].
D’après les chiffres fournis par le Baromètre des activités sportives en France[5], en 2020, 65 % des Français de 15 ans et plus ont pratiqué au moins une activité physique et sportive au cours des douze mois précédents. Si ce chiffre indique une certaine appétence des Français pour le sport, un regard plus approfondi révèle une tendance intéressante : les adeptes des « sports de forme », incluant la gymnastique et les activités de musculation, sont de plus en plus nombreux. On note par exemple une hausse de 6 points par rapport à 2018 (22 % en 2018 contre 28 % en 2020). De même, l’engouement pour les sports pratiqués en ville marque un progrès certain, avec une hausse de 2 points entre les mêmes années de référence (de 4 à 6 %).
C’est dans ce contexte que le street workout a assis sa place au sein des activités sportives outdoor pratiquées par les Français. La discipline arrive et se développe en France à partir de 2010, avec la figure de « MC Jean Gab1’ » en particulier, fondateur de la Punishment Team qui essaime la pratique dans toute la France. Très vite, à partir de 2011, des compétitions de street workout sont organisées, telles que le Pull and Push, participant à sa popularisation. Aujourd’hui, on estime qu’environ 20 000 adeptes s’entraînent de façon régulière, réalisant dans les rues des mouvements rappelant à la fois la gymnastique et le bodybuilding.
Au final, ce sont ces liens noués essentiellement par les réseaux et les médias sociaux promouvant la « gratuité » associée à une diffusion large du corps musclé, qui permettent de créer un sentiment d’appartenance à une forme de communauté globale. En France par exemple, l’institutionnalisation croissante de ce sport avec la création d’associations et surtout de la Fédération nationale de street workout calisthenics (FNSWC) en 2015 en est la démonstration.
Le street workout ne peut alors désormais plus être perçu comme une pratique isolée, il s’agit au contraire d’une pratique systémique que nous relions au type de système économique caractérisant nos sociétés contemporaines : le « capitalisme des vulnérabilités[6]».
Fabriquer du muscle dans le capitalisme des vulnérabilités
Le street workout, comme d’autres pratiques d’exercice des muscles, ne se réalise pas dans un vide économique et social. Autrement dit, il s’agit d’un sport qui véhicule tout comme il entretient les principes et les valeurs de la société dans laquelle il prend place.
Or depuis les années 1980, nous sommes entrés dans l’ère que j’appelle « capitalisme des vulnérabilités ». De façon endogène, ce système économique produit un nombre de crises systémiques de plus en plus fréquentes et de forte ampleur (financières, économiques, sanitaires, etc.), laissant penser que chaque individu se situe dans un processus de « glissement » affectant négativement une ou plusieurs sphères de son existence (santé, emploi, famille, etc.), d’où le terme de vulnérabilités. Celles-ci s’accompagnent alors de peurs diverses : la peur d’être agressé·e, la peur de ne pas être assez homme ou femme, la peur d’être malade, la peur de mourir, et désormais la peur collective de voir l’espèce humaine disparaître. Pour lutter contre ces peurs, le « capitalisme des vulnérabilités » incite, par ses principes, ses valeurs et ses institutions[7], à la « responsabilisation » individuelle : c’est à l’individu de trouver les solutions ultimes, dans un contexte de désengagement des institutions régulatrices comme l’État et de progression symétrique des idées néolibérales.
C’est dans ce cadre que le rapport au corps se pose, puisque rappelons qu’il représente pour chaque individu cette interface physique entre un être et le monde extérieur. Il apparaît non seulement comme directement accessible, mais surtout comme une voie de salut dans un monde incertain, sur lequel nous aurions perdu toute forme d’emprise. Le corps est alors à investir pour faire face aux vulnérabilités ressenties, pour le rendre plus fort, plus résistant, plus adaptable, plus distinctif. Il s’agit moins d’accumuler quantitativement du capital corporel « à l’infini » que de pouvoir l’utiliser au mieux pour être flexible, réactif, en mouvement, et donc s’adapter pour survivre. Le street workout s’inscrit pleinement dans cette logique.
Tout d’abord, il offre la possibilité à des personnes aux ressources économiques limitées, de transformer leur corps – perçu comme une ressource de substitution car directement accessible et privée – en un capital valorisable sur un marché, dans le but d’en tirer un profit. Ce marché peut être symbolique : on fait valoir socialement le corps construit comme l’entraînement au sein de la ville ayant permis de le produire, pour en espérer un gain en termes de statut social. Dans le « capitalisme des vulnérabilités », comme la santé et l’apparence de la santé constituent des critères de catégorisation des individus, le corps exposé participe à l’acquisition du statut social en tant qu’indicateur visible. Les exemples de champions de la discipline décrits plus haut l’illustrent bien, puisqu’ils n’hésitent pas à relier leur expérience réussie à la quête d’un mode de vie « sain ».
Toutefois, ce profit symbolique est également susceptible de muter en profit économique : en particulier, étant donné que dans le « capitalisme des vulnérabilités » les réseaux sociaux constituent le médium central pour diffuser de l’information, il est possible d’espérer « faire carrière » par les likes obtenus. Le New-Yorkais Hannibal for King , de même que de très nombreux autres pratiquants, ont su populariser – et monétiser – leurs entraînements, notamment via Youtube ou Instagram, rappelons-le.
L’empowerment par encorporation du street workout dénote alors la possibilité de devenir un entrepreneur, personnage clé du capitalisme récent, dont l’activité productive est ici la fabrique du corps réalisée dans le cadre urbain. L’entrepreneur est le personnage qui prend des risques, innove, organise son quotidien pour réaliser un projet, ce qui le distingue de la masse. Avec le street workout, l’entrepreneur du corps déconstruit l’idée du « fatalisme » social, urbain et physique, en incitant au contraire les autres individus à faire de leur environnement défavorable une force, en s’en servant pour le sport. L’entrepreneur qui réussit est imité par d’autres, diffusant le processus à plus large échelle, et permettant alors au capitalisme de se renouveler grâce à la constitution de nouvelles sphères d’accumulation du capital. Spécifiquement, le street workout, par ses caractéristiques intrinsèques (« philosophie » et techniques de la pratique), incarne un nouveau modèle d’entrepreneur qui correspond aux attentes actuelles du capitalisme : flexibilité, inventivité, réaction, adaptation, lean management.
Avec le street workout, on produit le corps, mais en gardant l’esprit d’initiative, de réaction et de mouvement permanents, la possibilité de flexibilité, de résistance et d’adaptabilité du corps face à un environnement incertain, source de vulnérabilités. A nouveau, l’entraînement d’Hannibal vient à l’esprit ici, lui qui valorise davantage dans ses entraînements la recherche d’endurance dans le développement musculaire plutôt que la masse, et qui privilégie l’adaptabilité nutritionnelle plutôt que l’élaboration d’une diète fixe. Contrairement au bodybuilding qui produit de la masse accumulée en apparence « inutile », le muscle construit par les exercices du street workout convient parfaitement aux défis du monde actuel. Avec le street workout, l’entrepreneur du corps est capable de « maximiser » la faiblesse relative des ressources à sa disposition : celles économiques qui le concernent, mais surtout celles relatives au cadre urbain. Il y a fondamentalement une logique survivaliste à l’œuvre pour gérer au mieux ces ressources dans le street workout, ce qui correspond à une manière de gérer les vulnérabilités actuelles. A l’heure où de nombreux gouvernements insistent sur la nécessité de développer des pratiques « sobres » et soutenables, incluant le sport[8], le street workout apparaît comme la concrétisation de ces principes : faire « au mieux avec moins ».
C’est pourquoi l’extension de l’échelle de diffusion permet au street workout de valoriser un modèle urbain d’organisation de l’espace : la pratique participe au renouvellement et à la régulation des activités comme de l’environnement de la ville. C’est là que l’on perçoit l’évolution de la pratique tout comme celle de sa « fonction » sociale : à l’origine associée au dénuement urbain, elle a muté vers un modèle plus régulé (à travers l’idée que cette pratique est désormais légitime par rapport au fonctionnement de la ville, et du fait de la présence d’espaces dédiés à la pratique et intégrés au cadre urbain, sources de valorisation de la ville). En somme, avec les réseaux sociaux particulièrement, le street workout a ainsi essaimé mondialement pour créer certes une communauté planétaire, mais également un modèle d’organisation de l’espace urbain dédié aux pratiques sportives.
L’engouement croissant pour le street workout montre que cette pratique est désormais profondément ancrée dans nos modes de vie urbains. A l’origine de nature subversive, le street workout s’est aujourd’hui davantage institutionnalisé : il correspond aux besoins croissants de la population urbaine de pratiquer un sport au sein de la ville. De ce point de vue, il démontre clairement son potentiel pour lutter contre les effets négatifs de la sédentarisation et de l’urbanisation. C’est pourquoi le street workout est amené à continuer à se développer à l’avenir, sous différentes formes, notamment par l’intermédiaire de sa diffusion mondiale via les réseaux sociaux.
Toutefois, le street workout nous rappelle combien le corps est devenu le lieu ultime de centration de la vie individuelle, au sein du « capitalisme des vulnérabilités ».
Or si ce processus possède les vertus émancipatrices évoquées plus haut, il est aussi vecteur de nouvelles formes d’inégalités potentielles. Parvenir à « réussir » à « entreprendre » son corps pour faire face aux nouvelles attentes du capitalisme n’est pas chose aisée, tant entrent en jeu des facteurs multiples sources de nouvelles formes d’inégalités : économiques, informationnelles, sociales, sanitaires, technologiques. Dans le cas du street workout, il s’agit ici certes d’une question vécue individuellement, mais qui concerne aussi l’organisation de la ville. De ce fait, la capacité des villes à organiser cette régulation du corps dans l’espace public constitue un des enjeux majeurs de leur futur développement, avec le risque d’apparition de nouvelles formes d’inégalités spatiales à l’intérieur comme entre les villes elles-mêmes.
NDLR : Guillaume Vallet a récemment publié l’ouvrage La Fabrique du muscle aux éditions L’échappée, en 2022.