Société

Un revenu d’existence à l’ère du numérique

Politiste

Aux antipodes du projet libertarien de « revenu universel », la proposition de lutter contre les « aléas de l’existence » par l’instauration d’un revenu d’existence tout au long de la vie encadré par l’État permettrait de donner à la politique la chance de tracer une voie différente, et de songer (peut-être ?) à un ralentissement inespéré de l’hypercapitalisme.

Nous sommes dans un contexte d’accélération favorisé par un hypercapitalisme. Cet hypercapitalisme illustre une tendance à l’excès du capitalisme, amplifiée par un numérique omniprésent qui place à portée de doigts la majorité de nos actions du quotidien. La tendance est à la dérégulation, souvent au nez et à la barbe d’un pouvoir politique à la traine et avec le consentement volontaire des consommateurs. La « gratuité » contre nos données ou des paiements de services sans fin.

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Le contrôle accompagne cette mue de notre société avec puissance, silence, et une indéniable efficacité, se donnant comme objectif de mieux cibler nos attentes de consommation. Qui aurait pu imaginer qu’une telle « servitude volontaire » ait pu s’organiser avec si peu de résistance, là où l’État peine quant à lui à rester légitime dans l’imposition de ses règles.

Comment avons-nous pu en arriver là ? En partie, parce que l’individu trouve dans ce vaste océan numérique – où il peut se perdre factuellement mais aussi moralement et psychologiquement – une réponse à une envie de singularité. Il pense (et surtout on lui fait croire) qu’il est le maître du jeu. Mais la réalité est tout autre, même si nous ne nous attarderons pas plus sur cet aspect dans cet article. Ce que nous voulons montrer, c’est qu’une réflexion politique et philosophique sérieuse doit pouvoir trouver sa place dans ces enjeux de la « modernité ».

L’individualisme est mauvais quand il devient égoïsme, mise à l’écart et mépris d’autrui. Il trouve ses lettres de noblesse quand il entraîne la rencontre de l’autre dans ses différences et ses richesses. De ce point de vue-là, que cela soit dans la sphère numérique ou dans la réalité, cette même inclination vaut. Mais dans la sphère numérique, les évènements vont plus vite, l’isolement est plus facilement atteignable (ou subi), tout autant que la déconcentration chronique par les sollicitations attentionnelles devient la règle. L’échelle est également différente. Ce qui pou


[1] Marc Dugain et Christophe Labbé, L’Homme nu – La dictature invisible du numérique, Plon, 2016, p. 147.

[2] Ibid. p. 147.

[3] Florent Guénard, La passion de l’égalité, Seuil, 2022, p. 224-225.

[4] Ibid. p-225.

[5] Ce revenu d’existence se déclinerait selon nous avec une part capitalisée de 0 à 18 ans pour donner un capital d’émancipation déclenchable à 18 ans et un revenu d’existence mensuel de 18 ans à la mort. En somme, il ne cesserait jamais d’être donné de la naissance jusqu’à la mort mais il serait conservé pour nous donner un « starter » conséquent à 18 ans pour se lancer dans la vie. Il ressemble d’une certaine manière à une forme d’héritage pour toutes et tous.

[6] Cette volonté d’offrir les conditions favorables pour mener « une existence bien vécue » nous fait sémantiquement préférer le terme de revenu d’existence aux termes de revenu universel ou de revenu de base qui mettent davantage l’accent sur le mécanisme que sur l’idéal philosophique recherché (Guillaume Mathelier, L’égalité avant toute chose – Un revenu d’existence pour toute la vie, Le Bord de l’eau, 2022).

[7] Zaizoune, Sofiane, « “Nous devrons réfléchir sérieusement aux loisirs” : Daniel Susskind, l’économiste qui prédit un monde sans travail », Le Figaro, [En ligne] 9 février 2023. https://madame.lefigaro.fr/business/nous-devrons-reflechir-plus-serieusement-aux-loisirs-daniel-susskind-l-economiste-qui-predit-un-monde-sans-travail-20230209.

[8] Nous définissons le revenu comme « la part qui nous revient de droit ».

[9] La naissance identifiée comme la « première circonstance » nous donne le droit à un revenu d’existence (Guillaume Mathelier, L’égalité avant toute chose – Un revenu d’existence pour toute la vie, Le Bord de l’eau, 2022).

Guillaume Mathelier

Politiste, Docteur en sciences politiques

Notes

[1] Marc Dugain et Christophe Labbé, L’Homme nu – La dictature invisible du numérique, Plon, 2016, p. 147.

[2] Ibid. p. 147.

[3] Florent Guénard, La passion de l’égalité, Seuil, 2022, p. 224-225.

[4] Ibid. p-225.

[5] Ce revenu d’existence se déclinerait selon nous avec une part capitalisée de 0 à 18 ans pour donner un capital d’émancipation déclenchable à 18 ans et un revenu d’existence mensuel de 18 ans à la mort. En somme, il ne cesserait jamais d’être donné de la naissance jusqu’à la mort mais il serait conservé pour nous donner un « starter » conséquent à 18 ans pour se lancer dans la vie. Il ressemble d’une certaine manière à une forme d’héritage pour toutes et tous.

[6] Cette volonté d’offrir les conditions favorables pour mener « une existence bien vécue » nous fait sémantiquement préférer le terme de revenu d’existence aux termes de revenu universel ou de revenu de base qui mettent davantage l’accent sur le mécanisme que sur l’idéal philosophique recherché (Guillaume Mathelier, L’égalité avant toute chose – Un revenu d’existence pour toute la vie, Le Bord de l’eau, 2022).

[7] Zaizoune, Sofiane, « “Nous devrons réfléchir sérieusement aux loisirs” : Daniel Susskind, l’économiste qui prédit un monde sans travail », Le Figaro, [En ligne] 9 février 2023. https://madame.lefigaro.fr/business/nous-devrons-reflechir-plus-serieusement-aux-loisirs-daniel-susskind-l-economiste-qui-predit-un-monde-sans-travail-20230209.

[8] Nous définissons le revenu comme « la part qui nous revient de droit ».

[9] La naissance identifiée comme la « première circonstance » nous donne le droit à un revenu d’existence (Guillaume Mathelier, L’égalité avant toute chose – Un revenu d’existence pour toute la vie, Le Bord de l’eau, 2022).