Rediffusion

Le managérialisme, bras armé de la pratique macroniste du pouvoir

Enseignant-chercheur en sciences de gestion

Comment décrire la pratique de gouvernement du président Macron ? La recherche en sciences de gestion peut être précise à ce sujet : il s’agit de managérialisme. En particulier, la gestion de ce que l’on appelle la « résistance au changement ». L’innovation sociale apportée par la décision étant considérée comme bonne par essence, ceux qui y résistent soit ne comprendraient pas leur intérêt – il faudrait alors « faire preuve de pédagogie » – soit seraient par nature réfractaire au changement – eux ne peuvent être « raisonnés ». Rediffusion d’un article du 5 juin 2023

La séquence entamée depuis la fin 2022 autour de la question des retraites et de la répression violente des mouvements contestataires populaires est venue sceller une forme de consensus des intellectuel·les sur la profonde crise politique que nous traversons.

La récente tribune du politiste Jean-François Bayart, publiée dans le journal suisse Le Temps, apporte une analyse froide, mais terriblement juste sur le pouvoir d’Emmanuel Macron dont la dérive est intrinsèquement liée à son positionnement politique d’extrême centre, ainsi qu’à son idéologie économique néolibérale. Les analyses des implications en matière de pratique de l’État se multiplient dans les champs de l’histoire et de la science politique, ce double ancrage permettant de comprendre la logique de pensée du gouvernement.

Ainsi, lors de la crise des Gilets jaunes, l’historien Pierre Serna avait alerté sur la nature véritable de la macronie dans son livre L’extrême centre ou le poison français : 1789-2019. Selon lui, l’extrême centre repose sur trois phénomènes. Le premier est la constitution d’un parti de « girouettes » qui attire l’ensemble des hommes et femmes politiques dont l’engagement politique relève plus de l’opportunisme que de la fidélité et la continuité dans les idées. Le deuxième est la modération langagière qui correspond à une attitude pondérée, calme reflétant la raison dont ils se revendiquent pour rechercher le consensus en toute situation… tout en menant des politiques de répressions massives de la moindre contestation. Enfin, la troisième dynamique est un déclassement du pouvoir législatif au profit du pouvoir exécutif sous le prétexte que contrairement au Parlement, qui est élu par le peuple et se sclérose dans la lutte droite/gauche, l’exécutif, lui, n’a pas d’idéologie : il applique la loi.

Ce positionnement s’articule parfaitement avec le néolibéralisme dont le philosophe Pierre Dardot montre qu’il est intrinsèquement autoritaire du fait de sa volonté de constitutionnaliser le dr


Alexandre Renaud

Enseignant-chercheur en sciences de gestion, Professeur associé en stratégie à l'EM Normandie