Politique

De l’ordolibéralisme à l’ordo-communalisme

Co-Fondatrice du collectif pour une Société des communs, Co-Fondateur du collectif pour une Société des communs, Sociologue

Peut-on tirer les leçons de l’ordolibéralisme pour transformer en profondeur nos institutions et promouvoir un nouveau modèle de société ? Face aux limites de l’économie de marché, notamment son incapacité à répondre aux défis écologiques et sociaux, l’idée d’un ordo-communalisme émerge.

Les politiques néolibérales ont conduit à confier au marché l’organisation d’une part de plus en plus importante de la société. Or la vision absolutiste de l’économie de marché a, depuis de nombreuses années, montré ses limites et ses dangers. Elle se révèle notamment incapable de faire face aux enjeux écologiques et sociaux de notre siècle, voire elle contribue à les aggraver.

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De nombreuses organisations tentent d’incarner une économie alternative plus sociale, solidaire et écologique. Nous pensons en particulier à celles qui se structurent autour de la logique des communs, défendant des formes de communautés coopératives, de propriétés socialisées et de gouvernance démocratique : banques coopératives, mutuelles de santé, habitats partagés, coopératives agricoles, crèches parentales. Pourtant, force est de constater qu’elles ne parviennent à occuper qu’une part encore marginale de l’économie. L’environnement institutionnel, façonné par et pour l’économie de marché, constitue un frein majeur à leur émergence et leur passage à l’échelle pour en faire une réelle alternative au capitalisme marchand. L’État, son fonctionnement et les règles qu’il institue, jouent aujourd’hui un rôle central dans la dynamique d’accélération de ce dernier.

Dans ce contexte, la question du rapport à l’État interroge l’ensemble des mouvements sociaux et des organisations qui défendent une économie des communs. Ils adoptent généralement trois stratégies face à celui-ci : une stratégie de fuite qui cherche à développer les alternatives dans les interstices du système actuel[1] ; une stratégie de confrontation qui vise à contrer l’État pour faire émerger des organisations politiques alternatives[2] ; une stratégie partenariale qui plaide pour un soutien public aux initiatives[3]. Si cette dernière stratégie nous semble la plus à même de faire de l’économie des communs une réelle alternative au capitalisme marchand, elle envisage l’État comme un instrument, sans remettre suffisamment


[1] Angelos Varvarousis, « The rhizomatic expansion of commoning through social movements », Ecological Economics, 1er mai 2020, vol.171.

[2] Pierre Dardot, et Christian Laval, Commun : essai sur la révolution au XXIe siècle, La Découverte, 2014.

[3] Michel Bauwens et Vasilis Kostakis, Manifeste pour une véritable économie collaborative : vers une société des communs, Éditions Charles Léopold Mayer, 2017.

[4] Elinor Ostrom, La gouvernance des biens communs : Pour une nouvelle approche des ressources naturelles, Commission Université Palais, 2010.

[5] L’ordolibéralisme est né en Allemagne dans les années 1930, notamment à l’école de Fribourg, comme une réponse intellectuelle à la crise économique et à la menace du totalitarisme, en préconisant une économie sociale de marché régulée par l’État.

[6] Michel Dévoluy, « L’ordolibéralisme et la construction européenne », Revue internationale et stratégique, 103, 26-36, 2016.

[7] Walter Eucken, « Das ordnungspolitische Problem », Ordo-Jahrbuch für die Ordnung der Wirtschaft und Gesellschaft, vol. I, 1948, p. 72.

[8] Hugues Rabault (dir.), L’ordolibéralisme, aux origines de l’École de Fribourg-en-Brisgau, l’Harmattan, 2016, p.260.

[9] On s’étonnera moins de cette caractéristique si on se souvient que parmi les fondateurs de cette école se trouvent, en plus d’un économiste, des juristes et des hommes politiques.

[10] Michel Dévoluy, op. cit.

[11] Marc Deschamps, Fabien Labondance, « II / La Banque centrale européenne au prisme de l’ordolibéralisme », L’économie européenne 2019, La Découverte, 2019, pp. 18-29.

[12] Pierre Dardot, Christian Laval, Commun. Essai sur la révolution au XXIe siècle, 2014.

[13] « Le Nouveau Management Public nie – ou en tout cas minimise – toute différence de nature entre gestion publique et gestion privée », Matthias Finger, Le New Public Management – reflet et initiateur d’un changement de paradigme dans la gestion des affaires publiques, IDHEAP, 1997.

[14] Sébastien Sorinao, Un avenir pour le serv

Louise Guillot

Co-Fondatrice du collectif pour une Société des communs

Rémy Seillier

Co-Fondateur du collectif pour une Société des communs

Sebastien Shulz

Sociologue, Co-fondateur du collectif pour une Société des communs

Rayonnages

Politique

Notes

[1] Angelos Varvarousis, « The rhizomatic expansion of commoning through social movements », Ecological Economics, 1er mai 2020, vol.171.

[2] Pierre Dardot, et Christian Laval, Commun : essai sur la révolution au XXIe siècle, La Découverte, 2014.

[3] Michel Bauwens et Vasilis Kostakis, Manifeste pour une véritable économie collaborative : vers une société des communs, Éditions Charles Léopold Mayer, 2017.

[4] Elinor Ostrom, La gouvernance des biens communs : Pour une nouvelle approche des ressources naturelles, Commission Université Palais, 2010.

[5] L’ordolibéralisme est né en Allemagne dans les années 1930, notamment à l’école de Fribourg, comme une réponse intellectuelle à la crise économique et à la menace du totalitarisme, en préconisant une économie sociale de marché régulée par l’État.

[6] Michel Dévoluy, « L’ordolibéralisme et la construction européenne », Revue internationale et stratégique, 103, 26-36, 2016.

[7] Walter Eucken, « Das ordnungspolitische Problem », Ordo-Jahrbuch für die Ordnung der Wirtschaft und Gesellschaft, vol. I, 1948, p. 72.

[8] Hugues Rabault (dir.), L’ordolibéralisme, aux origines de l’École de Fribourg-en-Brisgau, l’Harmattan, 2016, p.260.

[9] On s’étonnera moins de cette caractéristique si on se souvient que parmi les fondateurs de cette école se trouvent, en plus d’un économiste, des juristes et des hommes politiques.

[10] Michel Dévoluy, op. cit.

[11] Marc Deschamps, Fabien Labondance, « II / La Banque centrale européenne au prisme de l’ordolibéralisme », L’économie européenne 2019, La Découverte, 2019, pp. 18-29.

[12] Pierre Dardot, Christian Laval, Commun. Essai sur la révolution au XXIe siècle, 2014.

[13] « Le Nouveau Management Public nie – ou en tout cas minimise – toute différence de nature entre gestion publique et gestion privée », Matthias Finger, Le New Public Management – reflet et initiateur d’un changement de paradigme dans la gestion des affaires publiques, IDHEAP, 1997.

[14] Sébastien Sorinao, Un avenir pour le serv