Écologie

La fiction peut-elle nous aider à remettre la « nature écologique » au cœur ?

Écologue

De trop rares écrivains se rendent aujourd’hui attentifs aux savoirs de la biologie. Il est pourtant impératif de relier entre elles ces deux types de sensibilité à la nature et à la création artistique. En intégrant la nature et la biodiversité, la fiction littéraire participe à nourrir un imaginaire émancipateur.

Dans son rapport de 2019 sur l’état global de la biodiversité, la Plateforme internationale pour la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) formule le message suivant : nous – êtres et sociétés humaines – n’atteindrons aucun des objectifs de soutenabilité votés par les Nations unies pour 2030 ou 2050 si nous ne mettons pas en œuvre des changements transformateurs de nos modèles économiques, sociaux, politiques et technologiques. Repris aussi par le GIEC en 2021, ces changements transformateurs incluent des modifications de ce qui fait sens pour nous en termes de qualité de vie, en lien avec la nature.

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La nature dont je parle ici est celle des écologues scientifiques, à savoir une multitude d’ensembles très diversifiés d’êtres vivants en interactions permanentes les uns avec les autres, dont les assemblages sont dynamiques et imprévisibles, et ce à toutes les échelles de temps ; je l’appellerai « nature écologique » dans la suite de ce texte. Ces systèmes n’ont pas spécialement besoin des humains pour exister, mais l’inverse n’est pas vrai : nous sommes une des espèces vivantes, en interaction de facto avec les autres vivants dans tous les moments de nos vies. Popularisée dès 2005 par l’ONU au travers des services écosystémiques, cette dépendance a été remise à l’honneur dans le cadre conceptuel de l’IPBES : bonne santé de la nature et bonne qualité de vie des humains sont étroitement liées.

Crise de la nature

Pourtant, et l’IPBES l’a rappelé en 2019, la nature est en crise profonde, et c’est à cause de nous, les humains. Parmi les facteurs indirects qui sous-tendent les actions néfastes pour la nature, se placent les valeurs que nous donnons à la nature, les relations que nous entretenons avec elle, la place que nous lui donnons dans notre vie. Or, comme l’a énoncé le naturaliste américain Robert Pyle dès les années 1980, les sociétés dites occidentales vivent ce qu’il appelle une extinction de l’expérience de nature, liée à deux phénomènes con


[1] « They were moving close together, suddendly seeing for the first time today the miracle that two months of rain and two days of spring heat could perform on a forest floor. It has burst out in mushrooms : yellow, red, browm, pink, deadly white (…) « – Oh, look at that ! (…) a Lady’s Slipper ». The little pink orchid was growing here wher she knoex it ought to be, where the soil was sweetened by pines. » (p. 39-40).

[2] « If I want to remove you from your life and whisk you into a picnic on the banks of a river in Teotihuacán, here are some things I need to know: what grows there, what trees, what flowers, in that month of the year? What does it smell like, are there bees? Birds? Is it dry or humid (…) ? »

Anne-Caroline Prévot

Écologue, Directrice de recherche au CNRS

Notes

[1] « They were moving close together, suddendly seeing for the first time today the miracle that two months of rain and two days of spring heat could perform on a forest floor. It has burst out in mushrooms : yellow, red, browm, pink, deadly white (…) « – Oh, look at that ! (…) a Lady’s Slipper ». The little pink orchid was growing here wher she knoex it ought to be, where the soil was sweetened by pines. » (p. 39-40).

[2] « If I want to remove you from your life and whisk you into a picnic on the banks of a river in Teotihuacán, here are some things I need to know: what grows there, what trees, what flowers, in that month of the year? What does it smell like, are there bees? Birds? Is it dry or humid (…) ? »