De l’extractivisme scientifique en astronomie
Le vénérable et toujours productif télescope Canada-France-Hawaï, en fonctionnement depuis 1979 sur une montagne de la Grande Île d’Hawaï, va-t-il devoir bientôt mettre fin à ses opérations ? De nombreux astronomes redoutent que ce scénario ne devienne réalité si les autorités hawaïennes ne trouvent pas rapidement une solution pour renouveler le bail des terres du sommet du volcan Mauna Kea, bail qui va arriver à expiration en 2033.

La cause la plus récente de ce blocage politique est la mobilisation inédite initiée en juillet 2019 par des milliers de personnes, dont de nombreux membres du peuple autochtone d’Hawaï, qui souhaitaient empêcher la construction sur le Mauna Kea d’un projet californien de télescope géant, dénommé le Télescope de trente mètres (Thirty Meter Telescope, TMT) en référence au diamètre de son miroir primaire.
Un véritable Notre-Dame-des-Landes hawaïen s’installa alors sur les pentes de lave sombre, avec son campement, son village, ses rituels de protection de la montagne sacrée et de remerciement des divinités qui y habitent, ses valeurs indissociablement hawaïennes et environnementales, et le souvenir inoubliable d’une expérience collective intense chez toutes celles et ceux qui y participèrent. Si la pandémie vit la plupart des manifestant·es rentrer chez eux, ce ne fut pas sans avoir obtenu la garantie que les travaux ne seraient pas initiés derrière leur dos. Depuis, la construction du TMT est toujours au point mort.
Aujourd’hui, divers efforts sont entrepris pour témoigner de la bonne volonté de la communauté scientifique. Parmi les quelque treize observatoires présents au sommet, les télescopes les plus anciens et les moins productifs – certains étant, de fait, déjà fermés depuis des années – sont en passe d’être déconstruits, ce qui n’est pas une mince affaire étant donné la taille de certains d’entre eux.
En 2022, une nouvelle autorité composée à la fois d’astronomes et d’opposant·es au TMT a été nommée par le gouverneur pour