Société

Face au narcotrafic et à une consommation galopante, dépénalisons l’usage de drogues

Sénatrice

Que font Gérald Darmanin et Bruno Retailleau lorsqu’ils surmobilisent police et justice pour la répression – très médiatisée – des usagers de drogues ? Ils incriminent les plus vulnérables, reproduisent les inégalités et délaissent la question de la santé publique ; pendant ce temps, le narcotrafic se porte très bien. Pis, ils instrumentalisent l’État, ses institutions et l’argent du contribuable, dans leur campagne en vue de 2027.

«Ce n’est pas une campagne de sensibilisation mais de culpabilisation que je lance aujourd’hui », a déclaré le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, jeudi 6 février, en insistant clairement sur le fait qu’il n’était pas ministre de la Santé. C’est donc dans la même direction que nous allons continuer. Dénoncer, culpabiliser et punir. Dommage. On aurait pu avoir une politique des drogues. On aurait pu agir et soigner notre société. C’est la communication et la morale du bien-pensant-qui-laisse-mourir qui a gagné.

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Le modèle répressif français en matière de stupéfiants, en vigueur depuis plus de cinquante ans, montre, en effet, aujourd’hui plus que jamais, ses limites. En dépit d’un arsenal pénal parmi les plus rigoureux d’Europe, la consommation de drogues atteint des niveaux record en France.

Face au constat de cette inefficacité et aux coûts exorbitants de la répression, j’ai déposé une proposition de loi visant à dépénaliser l’usage de (toutes les) drogues afin d’inscrire la réponse publique dans une approche de santé et de prévention. Un revirement à cent quatre-vingts degrés qui s’inspire des succès rencontrés dans d’autres pays, à l’instar du Portugal.

« Nul n’a le droit de consommer de la drogue »

Le modèle répressif actuel repose sur la loi du 31 décembre 1970 qui pénalise l’usage de stupéfiants. Cette loi, issue de deux initiatives parlementaires sur la répression des drogues, fut ensuite largement enrichie par les députés, et notamment par Pierre Mazeaud, rapporteur Union des démocrates pour la République (UDR) pour l’Assemblée nationale, avec l’établissement d’un pan sanitaire. La loi prévoyait, en effet, qu’en cas d’un usage illicite de stupéfiants, détecté par la police ou un médecin, l’usager·e serait placé·e sous la surveillance de l’autorité sanitaire. Le gouvernement a souhaité ajouter, par amendement, la pénalisation de l’usage pour « équilibrer » les dispositions sanitaires. Dans la loi de 1970, par l’injonction thérapeutique, l’usage


Anne Souyris

Sénatrice, Cheffe de file et porte-parole des questions de santé du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires (GEST)