Politique

Ne pas consentir au fascisme qui vient

Politiste

Avec la réélection de Trump, le fascisme occupe la scène politique et médiatique. Face aux concessions qui lui ont été faites, notamment par le macronisme, il faut réaffirmer une ligne claire : le fascisme doit être reconnu, nommé, combattu. Et que soient posées les conditions de l’émancipation. L’universalisme véritable, celui qui permet de penser en termes de volonté et non pas d’origine, en est un moyen. En partenariat avec le festival Printemps des Humanités du Campus Condorcet.

Qui peut raisonnablement douter du racisme, du sexisme et de l’homophobie de Donald Trump ? En France, les propos du nouveau président américain tomberaient sous le coup de la loi. Cette évidence n’a pas empêché les journalistes de l’émission de LCI « 24 heures Pujadas », le 23 janvier dernier, de condamner unanimement la décision de la Radio-télévision belge de la Communauté française (RTBF), laquelle a choisi, afin de limiter le risque de diffusion de propos injurieux, une retransmission en léger différé du discours d’investiture du 20 janvier. Pour les commentateurs, parmi lesquels Bernard Guetta et Jean Quatremer (Libération !), aucun doute : la RTBF, en établissant un « cordon sanitaire médiatique », a commis une impardonnable faute professionnelle, en « censurant » la parole présidentielle. La veille, sur la même chaîne, et dans la même émission, Robert Ménard, maire de Béziers (et ancien président de Reporters sans frontières), avait vanté les mérites d’un Donald Trump « qui sait comment parler au peuple » : Vincent Hugeux fut le seul à fermement protester contre cet éloge du style populiste et de l’anti-intellectualisme par l’édile biterrois.

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Le macronisme comme pensée de l’acquiescement

Ne sont-ce pas là de claires manifestations du consentement au fascisme qui vient ? Dans l’explication de ce consentement, le macronisme porte une très lourde responsabilité. Celle-ci ne tient pas principalement à la faute politique que fut la dissolution. Certes, cette dernière a donné consistance au rêve de l’extrême droite de s’emparer du pouvoir. Mais, plus fondamentalement, c’est la conception macroniste du politique qui a servi de marchepied au Rassemblement national en restreignant l’espace de la délibération démocratique. Pour le macronisme, en cela héritier du libertarianisme, il existe un ordre naturel des choses, et ceux qui n’en reconnaissent pas la réalité sont irrationnels. Rien ne doit être fait qui puisse entraver les décisions des acteurs du marché


[1] Umberto Eco, Reconnaître le fascisme, Grasset, coll. « Les Cahiers rouges », 2024.

[2] Danièle Lochak, « Racismes, antiracismes : reconstruire l’universalisme », Pouvoirs, n°181, 2022/2, p. 141. La citation de F. Wolff est dans Plaidoyer pour l’universel, 2019, p. 28.

[3] Pierre Guenancia, « Identité et cosmopolitisme », Raison présente, no 201, 1er trimestre 2017, p. 77.

[4] Paul Audi, « Entretien avec Jean-Marie Durand », Philomag, 28 septembre 2022.

[5] Emmanuel Levinas, Totalité et infini. Essai sur l’extériorité, La Haye, Martinus Nijhoff, 1961, p. 258.

Alain Policar

Politiste, Chercheur associé au Cevipof

Notes

[1] Umberto Eco, Reconnaître le fascisme, Grasset, coll. « Les Cahiers rouges », 2024.

[2] Danièle Lochak, « Racismes, antiracismes : reconstruire l’universalisme », Pouvoirs, n°181, 2022/2, p. 141. La citation de F. Wolff est dans Plaidoyer pour l’universel, 2019, p. 28.

[3] Pierre Guenancia, « Identité et cosmopolitisme », Raison présente, no 201, 1er trimestre 2017, p. 77.

[4] Paul Audi, « Entretien avec Jean-Marie Durand », Philomag, 28 septembre 2022.

[5] Emmanuel Levinas, Totalité et infini. Essai sur l’extériorité, La Haye, Martinus Nijhoff, 1961, p. 258.