écologie

Trump touche le fond… des océans

Politiste

« We will drill, baby drill », slogan républicain repris à son compte par Donald Trump, devenu depuis l’hymne national de l’extractivisme façon Trump II, a trouvé une dernière victime : les fonds marins. Alors que ceux-ci sont protégés par l’ONU depuis les années 1970, le dernier décret de Donald Trump a autorisé leur exploitation, poursuivant ainsi ses démonstrations de défiance vis-à-vis du patrimoine commun de l’humanité – un édifice fragile, plus que jamais menacé.

Donald Trump a signé le 24 avril dernier un décret pour autoriser les exploitations minières sur le lit de la mer des territoires étatsuniens et internationaux. Cet acte unilatéral met au défi tout un régime international graduellement consolidé depuis plus de 50 ans et fondé sur le principe de la solidarité entre les États.

publicité

Dans ce cadre, les fonds marins et ses ressources minières ont été déclarés comme appartenant au patrimoine commun de l’humanité par l’Assemblée générale onusienne en 1970 avant de devenir un régime juridique en 1994, grâce à la Convention des Nations Unies du droit de la mer[1], laquelle est ratifiée par 169 États et l’Union Européenne.

Le patrimoine commun de l’humanité fut originairement élaboré pour freiner la menace de la territorialisation étatique des océans – et sa militarisation à l’époque de la guerre froide –, ce qui justifie que les États ne sont pas autorisés à revendiquer une souveraineté sur la zone internationale des fonds marins. La patrimonialisation des fonds a également été au cœur de débats acérés sur la solidarité Nord-Sud pour l’usage des ressources et des bénéfices économiques retirés. Il en découle un système sophistiqué, dit « parallèle », selon lequel l’accès aux ressources minières marines par un État (et l’industrie sous son patronage) est conditionné à réserver dans une banque de sites (site-banking system) un territoire d’égal valeur économique à être exploité par l’« ONU » elle-même ou en association avec un pays en développement. Ce système vise à combattre la monopolisation territoriale des océans et à assurer l’accès inclusif à des ressources situées dans un espace international. Il le fait notamment par une logique d’incitation à procéder à des transferts vers le Sud d’une technologie dans la pratique exclusive à quelques pays développés, et par le partage équitable des rentabilités économiques parmi ceux historiquement exclus du développement d’activités de pointe.

L’Autorité internationale des fond


[1] La Partie XI de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982 et l’accord relatif à l’application de la Partie XI de 1994.

[2] Par exemple, les proportions terrestres vs. maritimes dans la seule zone de Clarion-Clipperton au Pacifique, l’une de plus riches, sont estimées à 5.992 : 5.200 pour le manganèse et 274 : 150 pour le nickel en x106 tonnes. Voir James R. HEIN et al., « Deep-ocean mineral deposits as a source of critical metals for high- and green-technology applications: comparison with land-based resources », Ore Geology Reviews, 51, 2013, p. 11.

Natália Frozel Barros

Politiste, Maîtresse de Conférences en science politique à l’IEP de Fontainebleau, UPEC

Notes

[1] La Partie XI de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982 et l’accord relatif à l’application de la Partie XI de 1994.

[2] Par exemple, les proportions terrestres vs. maritimes dans la seule zone de Clarion-Clipperton au Pacifique, l’une de plus riches, sont estimées à 5.992 : 5.200 pour le manganèse et 274 : 150 pour le nickel en x106 tonnes. Voir James R. HEIN et al., « Deep-ocean mineral deposits as a source of critical metals for high- and green-technology applications: comparison with land-based resources », Ore Geology Reviews, 51, 2013, p. 11.