Dépasser le spectacle de la prison
Le mois d’avril a été marqué par de violentes attaques coordonnées contre les prisons et les personnels pénitentiaires. Des individus s’affichant sous le nom d’une association jusqu’alors inconnue (Défense des droits des prisonniers français), et rapprochés par la force publique et les acteurs du monde carcéral aux trafiquants de stupéfiants, ont monopolisé le débat sur les conditions carcérales, mettant en scène leur force et le conflit qui les oppose à l’État. Ces évènements font suite à l’évasion violente de Mohamed Amra le 14 mai 2024, durant laquelle deux agents pénitentiaires ont perdu la vie.

L’État, de son côté, s’est saisi de l’occasion pour justifier une réponse sécuritaire qui s’est concrétisée par l’annonce de l’ouverture de deux prisons de haute sécurité à Vendin-le-Vieil et Condé-Sur-Sarthe. Elles sont destinées aux « narcotrafiquants », une catégorie naturalisée dans le discours politique hexagonal mais qui traduit l’importation dans le débat public d’un imaginaire américain et diffusé par l’industrie cinématographique. Le 17 mai 2025 un troisième projet est annoncé. Une prison de haute sécurité devrait voir le jour à Saint-Laurent-Du-Maroni en Guyane. 500 détenus y seront incarcérés, dont 60 jugés dangereux et impliqués dans le trafic de stupéfiants et 15 détenus islamistes radicalisés. Il s’agit en réalité d’un projet ancien de cité de justice (comprenant tribunal et centre de détention) inscrit dans le cadre du plan d’urgence intégré dans les accords de Guyane signés le 21 avril 2017 et dont la construction avait été annoncé le 10 novembre 2023 par l’ancien garde des sceaux Eric Dupond-Moretti.
La cristallisation du débat sur l’enfermement des « narcotrafiquants » – notamment avec l’annonce du 17 mai, réactivant l’imaginaire du bagne en Guyane – nuit à la tenue d’un débat démocratique sur l’administration de la justice et de la peine. Ce débat est pourtant d’autant plus nécessaire depuis les mises en cause récurrentes des activités « lud