Guerre et répression de la résistance des femmes iraniennes
De mon enfance, une scène est gravée dans ma mémoire. Ma mère, mon père, mon frère et moi, nous nous tenons dans l’étroit couloir de notre maison à Téhéran, ce passage reliant la cuisine au salon. Tout est sombre et l’électricité est coupée. Le seul éclairage est la faible lumière d’une bougie dans la main de mon père. Les sentiments qui nous traversent tous c’est l’angoisse et l’inquiétude. Le temps semble suspendu. Je suis la plus petite de la famille, à peine trois ou quatre ans. De là où je suis, tout en bas, je vois les visages de mes proches éclairés par la flamme tremblante. Et dans cette lumière vacillante, ils paraissent encore plus inquiets. Les ombres dansent autour de nous, étranges, presque menaçantes. Je reste immobile, pétrifiée, observant tout, submergée par une peur que je ne comprends pas encore, mais que je ressens entièrement.

Les sons de cette époque me hantent encore. Il y a cette sirène – la sirène de la guerre – comme une musique sinistre devenue la bande-son de mon enfance. Et puis cette voix, grave, impassible : « Attention, attention… la voix que vous entendez est celle de l’alerte… réfugiez-vous dans les abris ou les lieux sûrs. » Puis la sirène continue, interminable, stridente. Mais ce qui reste le plus fort, dans ce souvenir, c’est l’image de mon frère. Il devait avoir huit ou neuf ans. Terrorisé, incapable de rester en place, il faisait des allers-retours dans le couloir en murmurant une prière, encore et encore, comme s’il cherchait à se protéger par les mots.
La guerre, pour moi, c’est avant tout cette image-là. Pas les chiffres, ni les décombres, mais cette scène qui se résume dans ce déplacement : de la paralysie angoissante des mouvements de la vie (et des joies d’enfant) à la danse des ombres de la terreur.
Ce souvenir d’enfance, qui donne à sentir comment la peur engloutit l’élan de tout mouvement, me replonge dans les premières années sombres de la République islamique. Ces années de répression étatique féroce, où l’