Nous sauver ?
Rien d’étonnant à ce que Musk et ses pairs n’aient qu’un désir, quitter la terre et se mettre sur orbite : est-ce vraiment un rêve, ou n’est-ce pas plutôt leur instinct de fauves qui les fait fuir l’incendie avant qu’il ne les atteigne ? À la nuance près, non négligeable, que ces fauves humains, ce sont eux les pyromanes qui ont allumé les feux qu’ils fuient. Mais qu’en est-il de nous ? De nous tous, les autres, restés dans la jungle, et à vrai dire peu tentés par une vie confinée dans un satellite de luxe hollywoodien…

Une belle expression, la jungle, pour rappeler que le combat pour la vie n’a cessé de mêler la prédation des uns et la survie des autres, mais aussi que cette survie des prédateurs exige de ne pas faire disparaître les proies dont on se nourrit. Ce point de vue post-darwinien intègre déjà mieux dans la politique de la nature l’ensemble de la vie, géologique, végétale, animale et humaine – et celle de la terre elle-même, désormais –, au lieu de séparer les humains d’un côté, leurs ressources pour vivre de l’autre.
Fuir dans les étoiles ?
La donne a changé. Depuis les temps les plus lointains, la politique s’est jouée entre humains, sur une terre pleine de ressources, livrée à la concurrence pour être exploitée au profit des uns et des autres – et de certains beaucoup plus que d’autres. Cette terre elle-même avait longtemps été respectée par les humains, elle était Gaïa, une alma mater inépuisable, parfois sévère ou terrible, mais immortelle, comme les dieux. L’idée des modernes est récente, de la déconsidérer comme déesse pour en faire une simple matière passive et s’en servir comme d’un réservoir inépuisable. La prise de conscience écologique a avant tout été de réaliser que la terre est elle aussi un être fragile ; elle n’est pas un vaste terrain de football sur lequel jouer entre rivaux et complices humains, elle fait partie du jeu elle-même – et les nombreux signes qu’elle nous envoie pour nous alerter sur son état ont bel et bien provoq