Littérature

K.O. boomer – sur Vers la violence de Blandine Rinkel

Critique

Dans Vers la violence, le portrait de femme que livre Blandine Rinkel commence par celui d’une enfant, Lou. Cette enfant est surtout fille de son père, qui l’élève dans une initiation aussi violente que caressante au monde qu’il imagine pour elle. Parce que la lecture est le témoignage de plus en plus étoffé de son omniprésence, il y a au cœur de ce roman une forme de tension insurmontable.

Dans son roman Vers la violence, le portrait de femme que nous livre Blandine Rinkel commence par celui d’une enfant. Lou grandit au bord de la mer, va à l’école, pratique la danse jusqu’à en faire son métier. Au début elle est « fille de » : l’enfant d’Annie, institutrice, et de Gérard, policier.

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Elle est surtout fille de son père, qui l’élève dans une initiation aussi violente que caressante au monde qu’il imagine pour elle. C’est un conte de la perpétuelle menace : à mesure que Lou fait le récit de sa vie, de cet héritage déstabilisant où se mêlent la séduction des imaginaires de l’enfance et l’élaboration d’une mainmise terrorisante du père sur ses enfants, est-il possible de discerner les forces qui lui appartiennent des réflexes inculqués, et de s’extraire de l’emprise patriarcale destructrice dans laquelle elle s’est tant bien que mal construite ?

La prédation aux multiples visages

Dans le récit de l’enfance, le portrait du père prend toute la place. Il est à la mesure du personnage qui s’étale dans le quotidien, en sa demeure et dans l’univers relationnel de l’enfant, éclipsant la mère, chassant les copines, menaçant les copains. C’est un personnage brillant, qui s’enrôle à 16 ans dans l’armée : « Honneur, Patrie, Valeur, Discipline […] Un atout. Quelque chose à soi, et pourtant quelque chose de plus grand que soi. Quelque chose que les autres n’avaient pas, et avec lequel on pourrait les impressionner sans trop en faire. ». Viré de l’armée, il continue de nourrir cette attirance pour l’uniforme et l’autorité par les armes dans la police montée, « se gavant au passage des œillades émerveillées des piétons ».

Il brille dans l’œil de sa petite fille, pour qui son rire est « ma musique préférée », pense-t-elle encore à l’orée de l’adolescence. Il brille par ses histoires merveilleuses, le récit de ses exploits, ses connivences avec sa fille dans le dos de la mère. Il parvient même à briller dans ses zones d’ombres, ses secrets et ses mystères – aux ye


Rose Vidal

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