OpenAI, une histoire en trois temps
L’analyse conjointe d’un ensemble de sources documentaires associées à OpenAI (publications scientifiques, posts de blog, articles de presse, documentation technique, vidéos de démonstration, dépôts GitHub, profils de médias sociaux) permet de rendre compte de l’évolution progressive des efforts de recherche et d’ingénierie de l’organisation : dans les premiers temps qui suivent sa création en décembre 2015, ces efforts se concentrent principalement sur la robotique et l’apprentissage par renforcement, l’un des trois principaux paradigmes d’apprentissage automatique dit « profond » (deep learning) avec l’apprentissage supervisé et son pendant non-supervisé[1] ; par la suite, l’intervalle 2018-2021 correspond à une période charnière pour la stratégie industrielle d’OpenAI, dont le positionnement économique, scientifique et idéologique va désormais s’aligner pleinement sur l’objectif prioritaire de développement et de déploiement de grands modèles ; enfin, le tournant des années 2020 semble amorcer le début d’un troisième moment où, pour faire face aux limites et dérives de ces mêmes modèles, la structure californienne fait se rencontrer les acquis des deux périodes précédentes autour d’enjeux de sûreté et d’alignement.

Ce premier temps s’ouvre avec l’annonce, en décembre 2015, de la création de l’organisation à but non lucratif OpenAI Inc. lors de l’avant-dernier jour de l’une des principales conférences scientifiques en intelligence artificielle, Neural Information Processing Systems (NeurIPS), qui se tient à Montréal cette année là. L’officialisation de l’existence de l’organisation fait suite à plusieurs mois de discussions et de tractations intenses entre plusieurs figures importantes de la Silicon Valley, haut lieu de l’innovation technologique aux États-Unis[2].Un soir de juillet 2015, Sam Altman, alors président de l’accélérateur de startups YC Combinator, organise un dîner à l’hôtel Rosewood Sand Hill, situé à proximité de l’université de Stanford e