Au cœur du sujet : Maria Schneider par Vanessa Schneider
En 1972, Bernardo Bertolucci a le projet de réaliser un film qui mettra en scène un homme vieillissant et désabusé, enfermé durant deux jours avec une jeune fille dans un huis clos sexuel paroxysmique. Il parvient à mettre la main sur un monstre des studios hollywoodiens : Marlon Brando, quarante-neuf ans à ce moment-là. Face à lui, le cinéaste enrôle une pure beauté brute, inconnue et encore mineure : Maria Schneider, dix-neuf ans. Alors que le tournage se déroule dans une atmosphère oppressante, Bertolucci trouve génial d’improviser, avec la complicité de Brando, une scène de viol avec sodomie, plaquette de beurre à l’appui, sans prévenir la jeune actrice. Et de filmer en gros plan sa terreur, ses larmes et son humiliation. Le dernier tango à Paris tenait son scandale.

Cette année-là, Vanessa Schneider avait trois ans. Maria était sa cousine et elle l’adorait.
Aujourd’hui la journaliste, grand reporter au Monde, a décidé de raconter cette vie-là et le désastre que le film a provoqué. Son livre est un des plus réussis de la rentrée.
Dès les premières pages, Schneider parvient à insuffler un rythme échevelé, à l’image de la vie de la comédienne décédée en 2011, et nous entraîne dans un texte qu’on ne lâche pas. Vanessa Schneider a choisi de s’adresser directement à sa cousine, et le tutoiement qu’elle adopte donne au texte une tonalité particulière, instaurant une sorte de conversation intimiste qui d’emblée nous plonge au cœur du sujet, au sens propre.
Vanessa Schneider a le talent de retenir des anecdotes qui interpellent et immédiatement font sens.
Schneider nous embarque donc tambour battant dans une existence dès le départ vouée à l’exceptionnel, les faux-semblants et la marginalité. Mais il s’agit d’abord de planter le décor, de restituer les faits. Maria est née de père inconnu – en réalité Daniel Gélin qui, marié ailleurs, ne pouvait officiellement la reconnaître. Enfant bousculée dans une relation de plus en plus conflictuelle avec sa mère, au point que ce