Injustice policière, injustice judiciaire : que disent les jeunes habitant·e·s de quartiers populaires ?
Les émeutes qui embrasent, depuis la fin des années 1970 au moins, les quartiers populaires ont presque toujours pour origine un événement impliquant la police et un habitant de ces quartiers[1].
L’émeute qui fait suite à la mort de Nahel ne fait pas exception : le sentiment d’injustice que suscite l’action de la police, et d’une forme d’impunité policière, constitue une dimension fondamentale, incontournable des émeutes. Autrement dit, on ne peut y voir simplement un élément de contexte ou « déclencheur », par opposition à des causes réputées structurelles et plus fondamentales : pourquoi les discriminations policières qui ont une longue histoire[2], et les divisions raciales auxquelles elles s’adossent seraient-elles moins structurelles que la montée du chômage ou la désindustrialisation ? Comprendre les sentiments d’injustice liés à la police et ce qui les alimente, en lien avec les jugements portés sur la justice apparaît, de ce fait, essentiel.
Enquête sur la jeunesse diverse des quartiers populaires
Réputées connues, les causes du sentiment d’injustice policière dans les quartiers populaires ne le sont pas tant que ça : on sait surtout qu’une part, minoritaire, des jeunes hommes, issus souvent des milieux populaires les plus précarisés, ont des interactions régulières conflictuelles avec les forces de l’ordre. Mais on connaît moins les propos des jeunes, nombreux, qui passent peu de temps dans le quartier ou « en bas des tours », et ont beaucoup moins souvent affaire à la police. On connaît moins le discours des jeunes habitants issus des classes moyennes, de celles et ceux qui poursuivent des études supérieures – et le regard que portent sur la police les filles, sans parler des habitant·e·s plus âgé·e·s, qui se plaignent souvent des « jeunes[3] ». Comment des personnes, parfois, que presque tout oppose en viennent-elle à tenir, au sujet de la police, des discours comparables, qui expriment un même sentiment d’injustice ?
Les enquêtes que nous avons menées d