Le devenir-Valls, un bonapartisme à l’envers
J’espère avoir un minimum d’imagination (j’essaie même modestement d’en vivre), mais jamais je n’aurais imaginé être un jour en route vers la présentation de la candidature de Manuel Valls à la mairie de Barcelone. Il en fallait beaucoup, à ma décharge, comme il fallait, de sa part, de l’audace, à moins que ce ne soit du mépris et de l’inconscience.

N’écoutant que mon courage (j’ai dû tendre l’oreille), je me suis donc rendu au CCCB, le Centre de culture contemporaine de Barcelone, pour l’annonce officielle du futur candidat. Une immense foule attendait là, mais qui ? Ce ne pouvait être le sauveur, encore moins le messie, ou alors je m’étais trompé de porte. Descendus tout droit des hauts quartiers, cravatés et huileux, la peau rêche et bronzée, le phrasé empesé, ses soutiens jouaient des coudes avec les journalistes. Tout ce beau monde trépignait, mais impossible de rentrer. Le Valls ferait-il encore salle comble ? Je pensais qu’une présidence entière était passée par là. Je m’approche. On ne laisse rentrer qu’au compte-goutte, la salle est pleine déjà. Des journalistes de la télévision et de la radio catalanes se font refouler, ça s’agite, odeur lourde de parfum et d’excitation, je me retrouve coincé contre un mur ; j’ai donc bien dû me tromper de porte. Je savais qu’il serait malaisé de se rendre à cet événement-là, mais pour de toutes autres raisons : rangées vides, moues circonspectes. Alors, tout à coup, je tremble. Ma chère ville de Barcelone serait-elle si désespérée qu’elle verrait en l’ex-premier ministre le grand réconciliateur ? Ou bien ne s’agit-il que d’une étrange curiosité ? Barcelone a été déjà suffisamment secouée ces dernières années, mérite-t-elle vraiment, en plus, cette onzième plaie d’Egypte ? Et puis non, je souffle, j’ai compris ; l’amphithéâtre était tout simplement trop petit.
Je me poste dehors et observe par-dessus l’épaule d’un journaliste de TV3, qui lui-même regarde la vidéo tournée par son confrère à l’intérieur. La svelte silhouet