Angela Davis et Gina Dent : « La violence d’État encourage la violence domestique, et celle-ci reproduit la première »
S’engager dans une conversation avec Angela Davis et Gina Dent en échangeant sur des questions qui sont au cœur de l’histoire culturelle, politique et sociale américaine permet de revisiter les jalons d’un activisme au long cours, tout en réfléchissant aux paramètres contemporains du féminisme, de la violence domestique et policière, de l’éducation, de la presse, du racisme et de la nécessaire abolition du système carcéral. La rencontre précieuse avec Angela Davis, philosophe, figure iconique de la lutte contre les discriminations, militante pour les libertés à l’échelle globale et Gina Dent, professeure associée aux départements des études féministes et des études juridiques de l’Université de Californie à Santa Cruz s’est tenue en Californie du Nord en septembre dernier. Toutes deux font de leur travail sur le terrain un des fondements de leur existence. L’entretien, en écho conjoint avec l’actualité et des recherches menées depuis plusieurs décennies, a permis de comparer les outils de la contestation politique entre les années 1970 et aujourd’hui. EZ
Angela Davis, votre livre Blues Legacy and Black Feminism paru en 1998 a été récemment traduit en français sous le titre Blues et féminisme noir (Libertalia). Il y a vingt ans, nous nous entretenions à son sujet et je m’interrogeais sur la phrase « le personnel est politique » devenue le slogan fédérateur d’une génération de féministes au tournant des années 1970. Je vous posais la question de savoir si cette notion était au cœur de votre réflexion et vous me répondiez en précisant que jusqu’à l’écriture de ce livre, vous étiez beaucoup plus intéressée par le « collectif » que le « personnel ». Vous précisiez néanmoins que, grâce à cette recherche, vous aviez compris que le personnel peut être à la fois un outil politique et féministe. Qu’en est-il vingt ans plus tard ? Vous travaillez sur les problématiques de genre et de race depuis de nombreuses décennies, voyez-vous une grande différence dans leur tra